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Lutter contre l’optimisation fiscale des grandes entreprises

La semaine dernière, à l’occasion de sa visite aux Etats-Unis, François Hollande s’est rendu dans la Silicon Valley afin de mettre en lumière les liens entre ce pôle d’industries de pointe, et notre propre écosystème numérique, très développé.

Nous ne manquons pas, en effet, d’entreprises dynamiques et prometteuses dans ce domaine. Le Président de la République, accompagné de nombreux chefs d’entreprise français, a ainsi profité de cette visite pour présenter les fleurons de notre industrie, telle que la société Criteo, spécialisée dans le ciblage publicitaire, qui a récemment fait son entrée au Nasdaq, le deuxième plus grand marché d’actions des Etats-Unis.

Le chef de l’Etat a également rencontré les patrons d’entreprises françaises implantées dans la Silicon Valley, et a inauguré avec le maire de San Francisco le lancement d’un accélérateur de startups franco-américain qui vise à accompagner l’internationalisation d’entreprises françaises. Cet accélérateur, appelé « Maison de l’international », offrira notamment des services de conseil, l’accès à des financements adaptés, ou encore une mise en relation avec des réseaux de décideurs. 60 000 Français vivent aujourd’hui dans la Silicon Valley : il s’agit de la première communauté européenne sur place. Ce sont eux qui permettent l’internationalisation de nos entreprises, essentielle au dynamisme de la France dans le commerce mondial.

Cette visite ne saurait cependant masquer le problème majeur que constitue l’optimisation fiscale pratiquée par les géants américains. Du fait de la disparité des droits nationaux et de l’imperfection du droit international, une firme multinationale peut aisément choisir comme résidence fiscale un pays à l’imposition plus avantageuse. Ainsi, grâce à des montages complexes, Google, Amazon, Facebook, Apple et eBay réunis payent moins d’impôts en France que le site de vente en ligne Vente Privée. Cela n’est évidemment pas normal au regard du chiffre d’affaires qu’ils réalisent sur notre territoire, et crée des distorsions de concurrence, puisque les groupes américains ont davantage de marge de manœuvre sur les prix qu’ils peuvent proposer.

Les entreprises ne s’encadreront pas d’elles-mêmes, car elles considèrent le recours à l’optimisation fiscale comme une obligation vis-à-vis de leurs actionnaires. Pour traiter ce problème, l’idéal serait d’agir au niveau européen. Le débat sur l’harmonisation fiscale est de fait très présent au sein de l’Union. Toutefois, la règle de l’unanimité en matière fiscale bloque toute évolution de la législation, notamment du fait des réticences de certains Etats membres, qui, comme l’Irlande, tirent profit de la souplesse de leur législation, et n’entendent pas la modifier. C’est pourquoi les parlementaires français tentent d’encadrer le phénomène au niveau national, par exemple en introduisant dans le projet de loi de finances 2014 une disposition prévoyant que « toute personne commercialisant un schéma d’optimisation fiscale est tenue de déclarer ce schéma à l’administration préalablement à sa commercialisation », afin d’accroître la réactivité de l’administration. Autre disposition adoptée lors de l’examen du PLF 2014, l’élargissement de la notion d’abus de droit permet que soit considéré comme tel tout acte méconnaissant l’esprit de la loi non plus dans le but exclusif d’échapper à l’impôt, mais dans le but principal d’y échapper. Ce changement de dénomination doit permettre de faire passer dans le domaine de l’illégalité des entreprises pratiquant l’optimisation fiscale de manière abusive.

La visite du chef de l’Etat aux Etats-Unis illustre tout à la fois le dynamisme de notre pays en matière d’économie numérique, et les bénéfices de la coopération franco-américaine dans ce domaine. N’oublions pas, cependant, que la concurrence déloyale des grands groupes américains nuit à la compétitivité de nos propres entreprises, et qu’il est essentiel d’encadrer le recours à l’optimisation fiscale.

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