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Plastique : « Un nouvel élan écologique est à portée de main pour préserver notre environnement et notre santé. »

J’ai signé cette tribune parue dans le journal « Le Monde » avec de nombreux sénateurs membres du groupe socialistes et républicains, pour regretter  que le plastique et le tout jetable profitent de la pandémie pour faire peau neuve. A l’inverse nous souhaitons préparer la transition des industriels vers le réemploi et la réutilisation.

Tribune. La crise du COVID-19 a-t-elle ébranlé la prise de conscience environnementale à laquelle nous semblions être collectivement parvenus ? Au cœur de l’épidémie, le plastique et l’idéologie du tout jetable ont refait peau neuve. Si le recours massif aux outils de protection sanitaire non réutilisables a incontestablement permis de freiner l’expansion épidémique, leur utilisation sur le long terme n’est pas une solution.

Le plastique a pu être considéré, à tort, comme un rempart contre le virus, faisant bondir l’activité du secteur de la plasturgie à la faveur du suremballage et du plastique à usage unique. Il y a aussi des choix discutables, comme le recours aux masques chirurgicaux pour le grand public alors que des alternatives en tissu tout autant protectrices existaient et se développaient massivement.

Conséquence prévisible : ces objets se sont retrouvés abandonnés dans l’espace public et viennent aujourd’hui grossir les quelque 80 000 tonnes de plastique rejetées tous les ans sur le littoral français. Si notre consommation quotidienne et le respect du geste de tri peuvent avoir un impact sur la réduction des déchets, les producteurs doivent aussi endosser la responsabilité de la prolifération plastique.

Remise en question de nos modes de production

La réévaluation à 135 euros des amendes pour objets abandonnés sur la voie publique que vient de proposer le gouvernement s’inscrit dans une logique uniquement punitive, à l’encontre de l’utilisateur et n’interroge en rien sur l’origine de la pollution et la remise en question de nos modes de production. La seule réaction ne peut orienter la trajectoire de nos politiques publiques.

Pour contenir l’épidémie, le plexiglas a ainsi été déployé dans les commerces pour répondre à l’urgence sanitaire. Cette présence généralisée est l’exemple même du recours en masse à un matériau non recyclable dont nous devrions au plus vite penser le réemploi. Alors que les décrets d’application de la loi sur l’économie circulaire sont en cours de rédaction, le Medef vient de réitérer, sous couvert d’un vernis de prudence, sa demande visant à retarder leur publication et à en amoindrir la portée.

Fixant la trajectoire du zéro plastique à usage unique d’ici vingt ans et prévoyant l’interdiction des objets à usage unique en polystyrène dès 2021, la loi sur l’économie circulaire est en berne. Pourtant, l’avenir de nos économies et la préservation de notre environnement se jouent sur la transition écologique. Elle n’est pas un parent pauvre de la stratégie économique. C’est une conviction au cœur de notre vision politique.

Créer les conditions de la résilience climatique

Pour que le « monde d’après » ne soit pas une illusion, plusieurs principes doivent être affirmés et guider l’action publique. Cette crise que nous traversons peut être l’occasion de réinventer nos modes de production et de consommation. La transition écologique ne se fera pas sans accentuer la circularité de l’économie et sans recentrer nos industries stratégiques. Nous devons pour cela réaffirmer la culture du réemploi et de la réutilisation chez les industriels pour créer les conditions de la résilience climatique.

La responsabilité du producteur est au cœur de nos propositions : la durée de vie des marchandises étant limitée, tout produit devrait, dès sa mise en marché sur le territoire, s’insérer dans une filière en vue de son futur traitement. Les filières à responsabilité élargie qui, par le biais d’éco-organismes, ont le devoir de gérer ces flux de déchets constituent de bons outils et devraient être généralisées à l’ensemble des marchandises vendues sur le territoire.

Il est également essentiel de faire valoir un principe de précaution écologique qui prendrait en compte un rapport coût/avantage environnemental. Adossé à des aides publiques ciblées visant à promouvoir les biens décarbonés et un système d’étiquetage environnemental uniforme et obligatoire pour aider les acheteurs à préférer tels biens plutôt que d’autres, un véritable cercle économique vertueux serait initié.

Un plastique n’est jamais « bio »

Ce principe s’étendrait naturellement à la publicité, secteur trop peu encadré dans le domaine de l’écologie, où le greenwashing demeure trop souvent la règle des annonceurs. Finissons en enfin, avec la réinvention perpétuelle de la matière plastique. Si les plastiques biosourcés peuvent répondre à la raréfaction des ressources fossiles, ils ne sont pas pour autant systématiquement biodégradables comme leur appellation peut le laisser penser.

Un plastique n’est jamais « bio » et cette mention mérite d’être clarifiée. Elle est ouvertement trompeuse pour le consommateur et induit un risque d’abandon dans la nature. Nous n’avons pas non plus de données sur l’impact environnemental de ces plastiques. Le changement de paradigme est clair : il faut réduire le plastique à la source et ne pas se laisser tenter par la fausse croyance du tout recyclable. Comportements individuels et responsabilité politique doivent être conjointement engagés pour réduire la pollution plastique et renforcer l’économie circulaire.

Un nouvel élan écologique est à portée de main pour préserver notre environnement et notre santé. Cette transition implique un courage politique fort pour s’élever au-delà des postures et se saisir de ce kairos [le temps du moment opportun N.D.L.R.] écologique, cette occasion unique, pour présenter aux Français une véritable trajectoire de transition.

Les signataires de cette tribune sont sénateurs membres du groupe socialistes et républicains, il s’agit de : Maurice Antiste, sénateur de la Martinique ; Viviane Artigalas, sénatrice des Hautes-Pyrénées ; Claude Bérit-Débat, sénateur de la Dordogne ; Jacques Bigot, sénateur du Bas-Rhin ; Joël Bigot, sénateur de Maine-et-Loire ;Maryvonne Blondin, sénatrice du Finistère ; Nicole Bonnefoy, sénatrice de la Charente ; Yannick Botrel, sénateur des Côtes-d’Armor ; Martial Bourquin, ancien sénateur du Doubs ; Muriel Cabaret, sénatrice de la Sarthe ; Catherine Conconne, sénatrice de la Martinique ; Michel Dagbert, sénateur du Pas-de-Calais ; Gilbert-Luc Devinaz, sénateur du Rhône ; Jérôme Durain, sénateur de la Saône-et-Loire ; Alain Duran, sénateur de l’Ariège ; Corinne Féret, sénatrice du Calvados ; Jean-Luc Fichet, sénateur du Finistère ; Martine Filleul, sénatrice du Nord ; Hervé Gillé, sénateur de la Gironde ; Nadine Grelet-Certenais, ancienne sénatrice de la Sarthe ; Annie Guillemot, sénatrice du Rhône ; Laurence Harribey, sénatrice de la Gironde ; Jean-Michel Houllegate, sénateur de la Manche ; Olivier Jacquin, sénateur de la Meurthe-et-Moselle ; Patrick Kanner, sénateur du Nord ; Eric Kerrouche, sénateur des Landes ; Claudine Lepage, sénatrice représentant les Français établis hors de France ; Monique Lubin, sénatrice des Landes ; Victorin Lurel, sénateur de la Guadeloupe ; Christian Manable, sénateur de la Somme ; Didier Marie, sénateur de la Seine-Maritime ; Michelle Meunier, sénatrice de la Loire-Atlantique ; Franck Montaugé, sénateur du Gers ; Marie-Françoise Pérol-Dumont, sénatrice de la Haute-Vienne ; Angèle Préville, sénatrice du Lot ; Sylvie Robert, sénatrice d’Ille-et-Vilaine ; Marie-Noëlle Schoeller, sénatrice du Doubs ; Sophie Taillé-Polian, sénatrice du Val-de-Marne ; Jean-Claude Tissot, sénateur de la Loire ; Nelly Tocqueville, sénatrice de la Seine-Maritime ; Jean-Louis Tourenne, sénateur d’Ille-et-Vilaine

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