3

Créer un « registre des binationaux » : le vrai visage de la droite

Tout a commencé à Grenoble, le 30 juillet dernier. Nicolas Sarkozy y installait un nouveau préfet, nommé à la suite de violences survenues dans le quartier populaire de la Villeneuve dans lequel, après la mort de l’auteur d’un braquage, des coups de feu avaient été tirés en direction des policiers. Le chef de l’Etat n’avait pas hésité alors à transgresser le pacte républicain issu de la Résistance en discriminant des Français selon leur origine et en amalgamant délinquance et étranger.

Martial, il avait parlé d’une « guerre nationale » contre les voyous et promis la déchéance de la nationalité aux Français d’origine étrangère qui auraient volontairement porté atteinte à la vie de toute personne dépositaire de l’autorité publique. Ces propositions se justifiant selon lui par un hasardeux parallèle entre la délinquance et les difficultés d’intégration de certains immigrés, argumenté du taux de chômage élevé des étrangers non communautaires (24%). Bref, il ne manquait que le bruit et l’odeur des immigrés – dont parlait Jacques Chirac en 1991 sur le même sujet – pour parfaire ces paroles de haine

Ce discours marquait sans doute le début de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy, apprenti sorcier reparti à la pêche aux voix du Front national, avec la réussite que l’on sait. Même si, en mars dernier, le Conseil constitutionnel a, pour ainsi dire, enterré les mesures annoncées à Grenoble, en censurant treize articles de la loi Loppsi 2, le mal était fait. Les politiques – ministres ou élus – et éditorialistes se lâchent depuis sur tout et tout le temps, leur parole ayant été libérée par les discours anxiogènes du président. Plus rien n’est tabou et les médias s’arrachent désormais les « néo-réactionnaires » qui dopent leur audience à coup de coups de gueule autant populistes que vides d’analyse.

Aujourd’hui c’est au tour de Claude Goasguen de nous montrer le véritable visage de la droite. Député UMP du XVIème arrondissement de Paris, il est le rapporteur de la mission d’information parlementaire sur la nationalité dont il révèle, dans le journal La Croix , les grandes orientations. Et l’on n’est pas déçu :

« Il est certes impossible, comme le suggèrent certains extrémistes, de supprimer la bi-nationalité mais il faut la limiter. Je souhaite que l’on commence par enregistrer les situations de double nationalité au moment des actes de mariage, de naissance ou de naturalisation. On disposerait ainsi à terme d’un registre des binationaux.(…) Cela veut dire qu’on demanderait aux gens de choisir entre deux nationalités. Ou bien qu’on aille vers une limitation des droits politiques. Car il est tout de même gênant qu’une personne puisse voter en France et dans un autre État. »

Ficher les étrangers d’abord, les Français « d’origine ceci ou d’origine cela » ensuite … On dirait que l’histoire de France bégaye. Que l’idée resurgisse au moment où les droites populistes européennes refleurissent au printemps fait froid dans le dos.

Je le répète avec force : binationaux, nous sommes Français à part entière, avec les mêmes droits civiques et politiques que n’importe quel autre citoyen français. Cela n’est ni discutable ni négociable.

Face à ces attaques répétées, notre responsabilité n’en est que plus grande au regard de l’avenir des valeurs républicaines et laïques de notre Nation. S’il le faut, nous saurons nous mobiliser pour faire entendre la voix des Français de toutes origines, voix que l’on semble aujourd’hui vouloir faire taire.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*