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Lettre ouverte d’un binational à François Fillon

Les  récents propos tenus par le Premier ministre à l’encontre d’Eva Joly  ( « cette dame n’a pas une culture très ancienne, des traditions françaises, des valeurs françaises, de l’histoire française ») ont conduit Hassan Bahsoun, Conseiller à l’Assemblée des Français de l’étranger, à adresser en retour à François Fillon une lettre ouverte que je reproduis ici :

Monsieur le Premier Ministre,

Les Français binationaux établis à l’étranger ( près d’un million) comme ceux de l’Hexagone, se sentent aussi concernés qu’Eva Joly par vos récentes déclarations et doivent se demander avec inquiétude s’ils ont suffisamment assimilé les valeurs et la culture françaiseS, et pour tout dire, s’ils sont assez français. Je voudrais les rassurer et leur dire que notre Constitution stipule que tous les Français sont égaux en droits et en devoirs, et ne prévoit ni période probatoire, ni délai de carence ni tests d’évaluation de la connaissance des valeurs, de la langue et de la culture françaises. Au demeurant, si par extraordinaire de tels tests devaient un jour être exigés, je ne suis pas sûr que les plus mal notés seraient forcément ceux que l’on croit….

Monsieur le Premier Ministre, vous avez certainement en mémoire les noms des femmes et des hommes d’origine étrangère qui font honneur à la France : Curie, Zola, Thomas Paine, Troyat, Senghor, Houphouêt Boigny, Félix Eboué, dans le passé ; François Cheng, Assia Djebbar, Amine Maalouf, Max Gallo aujourd’hui et tant d’autres .

Depuis Clovis, c’est ainsi que s’est construite la France, par apports successifs et fécondants, pour aboutir à cette belle Nation dont la plus belle définition me semble être : « un commun vouloir de vie commune », empruntée à Léopold Sedar Senghor, président-poète, académicien, et binational Franco- Sénégalais. » La France c’est tous les Français » disait le Général de Gaulle.

Tout cela vous le saviez, mais l ‘occasion était sans doute trop belle, n’est-ce pas, à dix mois de l’élection présidentielle, d’aller à la pêche aux voix de l’extrême droite. Le pis est que cela s’est fait à l’étranger, en terre africaine, où vivent de nombreux binationaux. Après le discours de Dakar, c’était une maladresse de plus.

On peut comme moi ne pas être d’accord avec l’idée d’Eva Joly de remplacer les défilés militaires par des défilés citoyens mais nul ne peut lui dénier le droit d’exprimer une opinion et surtout se permettre, s’il ne la partage pas, d’évoquer ses origines au lieu de lui répondre sur le fond.

Le « virus des origines » a ceci de pernicieux, qu’une fois contracté, il fait confondre les origines et la nationalité. On n’ose imaginer les conséquences d’une telle épidémie sociale si elle devait se propager.

Mais laissons le dernier mot à Voltaire : « Qui sert bien son pays n’a pas besoin d’aïeux ».

Hassan Bahsoun, Conseiller à l’Assemblée des Français de l’étranger
DAKAR

 

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