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Scolarité obligatoire à trois ans : le gouvernement s’oppose à l’examen de la proposition de loi

Cette proposition de loi de ma collègue Françoise Cartron, dont je suis co-signataire, visait à « sanctuariser » l’école maternelle alors que de multiples attaques signent la volonté gouvernementale de remettre en cause son rôle spécifique et ses bienfaits. Sa portée était essentiellement symbolique et son implication financière faible puisque, d’ores et déjà, 99% des enfants de trois sont scolarisés.

Pourtant, le Ministre de l’Education nationale a choisi de bloquer l’examen du texte. Le risque de contrarier l’objectif du gouvernement devait être trop grand. Et sa volonté de démanteler l’école maternelle n’en est que plus patente.

Déjà la mise en place des jardins d’éveil vise sans conteste à fermer l’accès à l’école aux enfants de trois à quatre ans pour ne leur offrir qu’une « garderie améliorée », sans aucune vocation éducative ni formation spécifique de son personnel.

Alors même que de multiples études soulignent l’impact déterminant de la scolarisation précoce tant sur le parcours scolaire de l’élève que sur la réduction des inégalités sociales et culturelles.

Alors même aussi que l’attachement de nos concitoyens à cette spécificité française, et les Français établis hors de France peuvent particulièrement en témoigner, est indéniable puisque 4 parents sur 5 sont satisfaits du fonctionnement de notre école maternelle.

Quel crédit alors accorder à un gouvernement qui, il y a quelques semaines encore, à l’occasion de la rentrée scolaire, affichait une volonté « d’assurer la réussite pour chaque élève » et, dans le même temps, encourage le développement de structures d’accueil, dont la caractéristique est justement de ne pas être accessible à chaque élève puisque, contrairement à l’école maternelle, le jardin d’éveil est payant et donc discriminant ?

L’instruction obligatoire dès trois ans et la possibilité ouverte de scolariser les enfants de deux ans participent de la sauvegarde et la consolidation sans équivoque de l’école maternelle, reconnue dans ses missions éducatives, gratuite et accessible à toutes et tous.

Mais cette opinion ne semble pas partagée par tous et nous voilà bien loin de l’école, outil privilégié pour l’égalité des chances telle que porté par l’idéal républicain… et très proche du plus profond mépris exprimé à l’égard des enfants.

De la même façon, le rejet de tout débat sur cette question révèle le manque de considération du gouvernement à l’égard des mères et des familles. Il m’importe en effet de souligner ici que cette proposition de loi s’accompagnait aussi d’effets positifs pour les droits des femmes.

La scolarité obligatoire à 3 ans constitue un signal fort. Elle réduit le sentiment de culpabilité, encore trop souvent entretenue de façon insidieuse par notre société, chez les mères qui choisissent ou qui doivent exercer une activité professionnelle.

En outre, notre histoire révèle sans ambigüité le lien entre la scolarisation précoce et l’émancipation économique des femmes: dans les années 60, leur entrée massive sur le marché du travail a coïncidé avec l’augmentation du nombre d’enfants accueillis en maternelle. Faut-il rappeler que cinquante ans après, le déséquilibre dans la répartition des tâches familiales et domestiques entre les femmes et les hommes demeure flagrant. Conjugué à la carence comme au coût des dispositifs de garde, il a souvent pour conséquence le renoncement à l’exercice d’une activité professionnelle ou l’emploi à temps partiel et donc une dépendance économique ou une plus grande précarité, et aussi la persistance d’inégalités professionnelles.

La sécurisation de cette école maternelle, enviée à l’étranger, et qui concourt aussi à notre taux de natalité, le plus élevé d’Europe, tout aussi envié, répond donc à l’idéal d’égalité des chances pour tous, et aussi à celui d’égalité entre les femmes et les hommes. Il s’agit d’un véritable enjeu de société.

Enfin, je veux dénoncer l’indéniable affront pour la représentation parlementaire que représente l’attitude du gouvernement qui a choisit d’empêcher le débat plutôt que de « risquer » l’adoption par le Sénat d’une proposition de loi contraire à sa volonté. En arguant de l’article 40, jamais encore soulevé à ce stade de la procédure, il a utilisé un subterfuge, lui permettant de se dérober. C’est indigne de notre démocratie et constitue pas moins qu’une déclaration de guerre à l’encontre de la nouvelle majorité sénatoriale.

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