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Nouvelle gageure pour les Français établis dans certaines communes de Madagascar : parvenir à déclarer la naissance de son enfant avant dix jours à Tananarive, la capitale de l’île

La multiplication des actes de naissance considérés comme défectueux du fait de la mauvaise tenue du registre malgache, et refusés en conséquence à la transcription par nos autorités consulaires, devient une des plus fréquentes causes de réclamation des familles françaises établies dans certaines communes de Madagascar comme Toamasina (Tamatave) ou Tsararano, et la cause d’un parcours juridique désespérant.

J’avais interpellé par deux fois le ministre des Affaires étrangères sur cette question et les réponses de ses services invoquent la crainte de tentatives de falsification de l’état civil pour justifier la vérification systématique nécessaire sur place. Outre que ces vérifications sont lourdes à mener pour un poste consulaire de Tananarive qui ne dispose que de faibles ressources, et qu’elles occasionnent un allongement considérable des traitements des demandes de transcription, force est de constater que la vérification n’aboutit bien souvent qu’à confirmer la mauvaise tenue du registre et le refus de l’acte de naissance qui y est inscrit. Alors, quelle solution ?

La solution proposée « la plus satisfaisante pour les Français de Madagascar » « consisterait, dans les 30 jours prévus par les textes en vigueur, à venir déclarer la naissance de leurs enfants à l’officier d’état civil consulaire à Tananarive. »

Pour qui connait l’infrastructure routière de l’île, les routes secondaires sur des pistes inaccessibles, la circulation rendue impossible en période de pluies ou encore la distance du village de Tsararano de la capitale (460 km), oui, c’est une gageure de parvenir à déclarer la naissance de son enfant.

(ci-après les réponses à mes questions écrites)

Problèmes de détérioration des registres d’actes civils à Madagascar et leurs répercussions sur les demandes de CNF – question écrite du 19/07/2012 –

Mme Claudine Lepage appelle l’attention de M. le ministre des affaires étrangères sur les difficultés rencontrées par des Français établis à Madagascar à qui le service de la nationalité du tribunal d’instance de Paris 1er oppose un refus de délivrance d’un certificat de nationalité française au motif d’un doute existant sur l’authenticité de leur acte d’état civil qui figure sur le registre d’état civil malgache. Or il n’est pas rare que dans certains centres d’état civil de l’île les archives aient subi d’importantes détériorations du fait de l’insuffisance de mobilier de rangement adéquat qui ne protège plus les documents ou les laisse parfois à la merci de violentes intempéries ou des termites. Dans ce dernier cas, survenu dans la commune de Tsararano, le registre mangé par les termites a été reconstitué en 1990, avec toutefois des erreurs qui ont motivé une seconde reconstitution qui n’a pu encore aboutir du fait de l’éloignement des habitants appelés par la commune à venir avec leur acte de naissance aider à reconstituer le registre. Or les autorités consulaires dépêchées sur place à fins de vérification d’un acte de naissance ont conclu à des incohérences lesquelles, rapportées au tribunal d’instance de Paris 1er, ont conduit au refus de délivrance d’un certificat de nationalité française. Elle lui demande que le doute profite au demandeur de l’acte d’état civil détruit ou incomplètement reconstitué pour peu qu’un jugement d’un tribunal d’instance de Madagascar atteste des graves détériorations subies par un registre.

Réponse de M. le ministre des affaires étrangères le 20/09/2012
La détermination de la nationalité française résulte de l’existence de faits ou d’actes juridiques dont la preuve est administrée selon le droit commun qui les régit. Si la preuve des premiers est libre, celle des seconds lorsqu’ils concernent l’état des personnes (filiation, mariage, . . ) relève des dispositifs relatifs à l’état civil que mettent en œuvre les greffiers en chef sollicités pour établir et délivrer un certificat de nationalité française. En effet, les greffiers en chef ne peuvent délivrer un certificat de nationalité française que si le lien de filiation entre le requérant et son ascendant est dûment établi aux moyens d’actes de l’état civil probants au sens de l’article 47 du code civil : « Tout acte de l’état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toute vérification utile, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. » La présomption que pose ce texte n’étant pas irréfragable, les résultats des vérifications faites in situ par les autorités consulaires françaises permettent aux greffiers en chef sollicités d’apprécier en toute connaissance de cause la force probante de l’acte de l’état civil étranger qui lui a été remis. La détérioration des registres et la reconstitution d’actes à Madagascar ne sont pas les seuls éléments à l’origine des contrôles effectués par nos postes consulaires. Outre la production de faux actes d’état civil, nombreuses sont les pratiques visant à créer une filiation avec un parent français. La commune de Tsararano, située à 80 km de Majunga, n’échappe pas à ce phénomène. La situation en cours à Madagascar conduit donc à des vérifications lourdes, pour lesquelles notre poste consulaire à Tananarive ne dispose que de faibles ressources, allongeant considérablement le traitement des demandes de nos concitoyens. Nos agents ne peuvent cependant faire l’économie de ces contrôles requis par l’article 47 du code civil. Ils constituent, en effet, le seul moyen à la disposition de l’officier d’état civil consulaire pour lutter contre les filiations frauduleuses lesquelles n’ont pas pour seul effet de laisser croire à l’existence d’une filiation avec un parent français mais privent également, parfois à son insu, un parent malgache de son lien de paternité. Ces vérifications mettent également à jour des usurpations d’état civil par lesquelles certains de nos concitoyens se voient spoliés de leur identité. Enfin, ils demeurent le seul recours contre les fraudes à la nationalité.

Transcription des actes de naissance ou de reconnaissance à Toamasina (Madagascar)
– question écrite du 09/08/2012 –

Mme Claudine Lepage appelle l’attention de M. le ministre des affaires étrangères sur les grandes difficultés rencontrées par les Français établis à Toamasina, anciennement Tamatave, pour déclarer la naissance ou la reconnaissance de leur enfant, faute de la bonne tenue des registres d’état civil de cette commune. Depuis quelques années, et du fait d’autorités qui se sont succédées et ont été parfois destituées, les registres d’état civil de la mairie de Toamasina ne sont plus réglementaires. En conséquence de quoi les déclarations de naissances enregistrées ne sont pas considérées valables au regard de la législation malgache. Il arrive fréquemment en effet que les déclarations de naissances aient été copiées sur des feuilles de cahiers d’écolier, puis collées sur des livres servant de registre. Plus grave encore, ces déclarations de naissance ne sont parfois pas revêtues du sceau ou de la signature de l’officier d’état civil responsable, condition pourtant nécessaire, selon le recueil des lois civiles malgaches, à l’authentification de ces actes. Cette situation entraîne ainsi de nombreux refus de transcription d’actes de naissance ou de reconnaissance des autorités françaises pour défaut de validité du document d’origine. Elle lui demande si des mesures ne pourraient pas être envisagées pour que la situation particulière de Toamasina soit prise en compte afin de ne pas léser davantage les enfants français et leurs parents, astreints à saisir les tribunaux et à entamer un vrai parcours du combattant parce qu’ils sont victimes d’un acte d’état civil défectueux.

Réponse de M. le ministre des affaires étrangères le : 20/09/2012
La situation de l’état civil de la commune de Tamatave n’est pas sans provoquer de nombreuses difficultés à notre consulat général à Tananarive, compétent pour en transcrire les actes, lorsque ceux-ci concernent des Français. À l’occasion de missions de vérification des registres locaux, menées par nos agents consulaires, ceux-ci ont pu constater un grand nombre d’irrégularités concernant les actes relatifs à des Français (actes rajoutés, non signés…). Cette situation, qui, selon notre poste, est en voie d’amélioration, entraîne une grande confusion, y compris pour les fraudeurs lesquels produisent parfois des actes de registres qui n’existent pas encore. Dans ces circonstances, notre consulat général est contraint à une vérification sur place quasi systématique. Aussi, nos concitoyens qui ont recours à la transcription des actes de naissance de leurs enfants sont confrontés inévitablement à des délais de traitement et à un refus de transcription en cas d’irrégularité constatée, conformément à l’article 47 du code civil. Une solution plus satisfaisante pour les Français de Madagascar consisterait, dans les trente jours prévus par les textes en vigueur, à venir déclarer la naissance de leurs enfants à l’officier d’état civil consulaire à Tananarive.

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