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Appel pour une nomination de Malala au Prix Nobel de la Paix

Malala Yousafzai

J’ai signé, à l’instar de nombreux parlementaires, cet appel demandant que la jeune Pakistanaise Malala Yousafzai reçoive le Prix Nobel de la Paix.

« Si on ne donne pas de stylos à cette jeune génération, les terroristes leur donneront des armes » déclarait Malala Yousafzai sur Al-Jazeera il y a deux ans. Elle avait alors douze ans et défendait face aux talibans, via son blog, le droit des filles pakistanaises à aller à l’école au-delà du CM1. Le 26 octobre dernier, à la sortie de l’école, des talibans lui ont tiré dessus à bout portant. Tragique coïncidence, cette attaque, à laquelle elle a réchappé, est intervenue deux jours avant la tenue de la toute première Journée internationale des Filles proclamée par l’ONU, en soutien aux droits fondamentaux des fillettes et des adolescentes – au premier rang desquels l’éducation.

Ce terrible attentat semble avoir déclenché une véritable prise de conscience au Pakistan, où l’opinion publique, les médias, et nombre d’imams se sont élevés contre la barbarie des talibans. Le président pakistanais Asif Ali Zardari a même déclaré que cette tentative d’assassinat était « une attaque contre toutes les filles » au Pakistan. Le 9 octobre 2012 pourrait bien constituer un tournant dans la lutte contre les talibans…

Si Malala mérite le Prix Nobel de la Paix, au même titre que Martin Luther King, c’est parce que son combat dépasse largement les frontières de la vallée de Swat et du Pakistan. En quelques années seulement, et malgré son jeune âge, elle est devenue l’icône de la lutte contre la ségrégation du XXIe siècle: celle exercée à l’encontre des jeunes filles. Un fléau qui ne concerne pas seulement les zones gangrénées par les talibans et qui demeure trop souvent passé sous silence.

Dans le monde, 75 millions de jeunes filles n’ont pas accès à l’école, ce qui représente une fillette sur trois dans certaines zones. Malgré l’accroissement du taux d’inscription des filles à l’école, des millions de fillettes ne vont en classe que de manière épisodique et trop peu d’années pour acquérir une instruction suffisante. Les mariages précoces les retirent encore trop souvent des bancs de l’école: dans les pays en développement, une fille sur trois est mariée avant ses 18 ans.

Écarter les filles de l’école nie leur droit fondamental à l’instruction. C’est une violence inacceptable à l’encontre des femmes qui sont, dès leur plus jeune âge, privées d’autonomie: aucune indépendance possible quand on ne sait pas lire. C’est une menace pour la paix, comme l’illustre tragiquement l’histoire de Malala. C’est un véritable gâchis économique: le retard de scolarisation des filles par rapport aux garçons dans les pays les plus pauvres représente un coût de 92 milliards de dollars… quasiment l’équivalent du budget annuel de l’aide publique au développement dans le monde! C’est enfin un facteur de blocage pour le développement durable, en privant « la moitié du ciel » d’accès à la sphère publique et politique.

Plusieurs Nobel de la Paix ont déjà distingué des personnalités engagées en faveur des droits des femmes, et notamment la juge iranienne Shirin Ebadi en 2003, ainsi que les libériennes Ellen Johnson Sirleaf et Leymah Gbowee et la Yéménite Tawakkul Karman en 2011. Mais la prestigieuse distinction n’a encore jamais mis l’accent sur la cause spécifique des jeunes filles, alors même que les discriminations à l’encontre des femmes s’enracinent largement dans le traitement qui leur est fait pendant l’enfance et l’adolescence.

Décerner un Prix Nobel de la Paix à Malala Yusufzai donnerait un élan à la lutte contre des discriminations contre les jeunes filles trop ancrées dans les mœurs pour être efficacement combattues. Offrir une telle distinction internationale à celle qui, à 13 ans, a été la toute première récipiendaire du prix national pour la paix du Pakistan, constituerait un magnifique symbole de ce que les femmes et les jeunes filles ne doivent plus être considérées comme de passives victimes des discriminations mais des actrices essentielles des affaires publiques de leur patrie. Distinguer pour la première fois une mineure, dont le principal instrument de combat est un blog, serait enfin une reconnaissance du rôle crucial incombant aux jeunes pour que le XXIe siècle soit placé sous le signe de la paix – un bain de jouvence bienvenu pour ce prix plus que centenaire!

Voir ici la liste des 150 parlementaires français signataires :

 

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