J’ai participé hier à une réunion organisée à l’initiative de Pouria Amishahi avec quelques députés dont Patricia Adam et des représentants d’associations de parents sur la question de l’adoption, tout particulièrement de la Kafala .
Patricia Adam, avec qui j’avais fréquemment échangé après le séisme en Haïti sur la problématique de l’adoption, a beaucoup travaillé sur la question tout comme Monique Cerisier Ben Guiga au Sénat. J’ai repris le dossier depuis le départ de cette dernière du Sénat et j’espère que nous parviendrons à faire avancer la législation. La réunion avait pour objectif d’entendre les familles, de trouver le meilleur levier pour faire progresser le dossier et adopter une démarche commune.
Quel est le problème? Le droit français reconnaît deux formes d’adoption:
– l’adoption simple qui peut se faire quel que soit l’âge de l’adopté et qui ne rompt pas les liens de filiation préexistants, l’adopté conserve ses droits dans sa famille d’origine et n’entraîne pas l’acquisition de la nationalité française si l’adopté est étranger.
-et l’adoption plénière qui ne s’adresse qu’à des enfants de moins de 15 ans accueillis dans la famille dans la famille des adoptants depuis au moins 6 mois. La nouvelle filiation signifie une rupture totale avec la filiation d’origine à laquelle elle se substitue, elle est irrévocable. L’adopté jouit des mêmes droits et obligations qu’un enfant légitime. Il prend le nom de l’adoptant et il acquiert la nationalité française de droit dans les mêmes conditions qu’un enfant légitime ou naturel.
Dans les États musulmans , à l’exception de la Turquie, de l’Indonésie et de la Tunisie, il n’est pas question d’adoption au sens où nous l’entendons mais de Kafala qui est une forme de tutelle légale: en effet il s’agit de l’engagement de prendre bénévolement en charge l’entretien, l’éducation et la protection d’un enfant mineur, elle ne crée aucun lien de filiation. La Kafala est un concept juridique reconnu par le droit international.
La difficulté est de transcrire la Kafala dans le droit français. La loi du 6 juillet 2001 relative à l’adoption internationale , qui a pris en compte la ratification par notre pays de la Convention de La Haye marque une rupture dans le droit de l’adoption internationale en France. En effet » l’adoption d’un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution, sauf si ce mineur est né et réside habituellement en France. » L’exception relative à la naissance doit être soulignée car il est évident que la discrimination s’applique davantage en fonction du lieu de naissance qu’en fonction de la nationalité d’origine et qu’il s’agit d’éviter l’entrée en France de ces enfants et à fortiori l’acquisition de la nationalité française. D’autres États tels l’Espagne et l’Italie ont adopté des dispositions plus généreuses et compatibles avec l’intérêt des enfants concernés.
L’objectif poursuivi est de consolider le droit des enfants concernés et de mettre fin au système d’exception dont ils sont victimes puisque suivant leur lieu de naissance ils pourront ou non être adoptés par leur famille française. La convention internationale des Droits de l’enfant impose de privilégier le droit de l’enfant. Par conséquent nous souhaitons, tout comme les familles concernées, que les enfants pris en charge sous le régime de la Kafala puissent être adoptés selon les procédures en vigueur dans les cas d’adoption internationale et qu’en attendant le vote d’une telle loi, les enfants placés sous Kafala judiciaire à l’étranger puissent obtenir un visa longue durée correspondant à la durée de validité de leur passeport simplement pour pouvoir accompagner leurs « parents » en France.