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PJLF pour 2007
– Mission « Action extérieure de l'Etat » :
action culturelle et scientifique extérieure
Mercredi 29 novembre
Examen du rapport pour avis
La commission a ensuite procédé à
l'examen du rapport pour avis de Mme Monique
Cerisier-ben Guiga sur les crédits inscrits dans le
projet de loi de finances pour 2007 pour la mission
ministérielle « Action extérieure de l'Etat » : action
culturelle et scientifique extérieure (programme 185) et
pour l'action interministérielle « Médias » : audiovisuel
extérieur (programme 115).
Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
rapporteur pour avis, a souligné la difficulté d'établir des
comparaisons entre les exercices successifs dans le cadre d'un
budget dont le périmètre a été considérablement modifié au cours
des deux dernières années. Il est clair toutefois que les
crédits affectés à l'action culturelle extérieure stagnent : le
programme 185 « Rayonnnement culturel et scientifique »
n'augmente pas réellement, puisque les 9 millions d'euros
supplémentaires qui lui sont alloués constituent, à hauteur de
8 millions d'euros, un simple dégel des crédits de l'Agence pour
l'enseignement français à l'étranger. Les crédits du programme
115 « Audiovisuel extérieur » de la mission « Médias » sont
stabilisés à 160 millions d'euros. Les moyens financiers de
notre politique culturelle extérieure représentaient 13,4 % des
moyens globaux du ministère des affaires étrangères, et
reviennent en 2007 à 13,1 % d'un budget global qui, en réalité,
n'augmente pas. L'activité culturelle ne constitue plus, malgré
les proclamations officielles, un outil essentiel de la
diplomatie française et il y a très loin des discours aux choix
budgétaires. Elle a par ailleurs souligné que le budget de
l'action culturelle évoluait dans un contexte flou et mouvant :
le partage de la politique de rayonnement culturel entre les
programmes 185 et 209 est artificiel et ne permet pas au
Parlement d'avoir connaissance de l'évolution et de la cohérence
de l'ensemble de ces crédits. Aussi bien est-il nécessaire de
regrouper les crédits de l'Action culturelle extérieure dans le
programme 185, démarche à laquelle le ministre des affaires
étrangères ne semble pas opposé.
Elle a par ailleurs insisté sur
l'inadaptation de la maquette budgétaire en matière de politique
audiovisuelle extérieure. RFI et TV5 sont rassemblés dans le
programme 115, qui relève du ministre des affaires étrangères,
alors qu'au sein de la mission interministérielle « Médias »,
les programmes « Presse » et « Chaîne française d'information
internationale » (France 24) dépendent du Premier ministre. Il
est difficile de comprendre que France 24, qui répond
précisément à l'objectif de politique audiovisuelle extérieure,
fasse ainsi l'objet d'un programme distinct.
Mme Monique Cerisier-ben
Guiga, rapporteur pour avis, a ensuite détaillé les quatre
actions qui constituent le programme 185 :
L'action n° 1, « Animation des
réseaux », n'a augmenté que de 2,2 millions d'euros en cinq ans,
ce qui ne favorise pas la rationalisation du réseau culturel et
rend difficiles les opérations de regroupement des personnels.
De plus, les crédits restant disponibles pour les actions
culturelles proprement dites ne permettent pas de répondre
positivement aux demandes locales de soutien à des opérations
culturelles, ni d'organiser des événements de haut niveau.
L'action n° 2, « Langue et
culture françaises », repose notamment sur le « plan pluriannuel
pour le français dans l'Union européenne », centré sur la
formation à notre langue des fonctionnaires et diplomates non
francophones siégeant à Bruxelles. Les crédits qui y sont
consacrés reviennent de 111,16 millions d'euros en 2006, à
108,61 millions d'euros en 2007 (- 2,28 %).
L'action n° 4 concerne le
« Renforcement des échanges scientifiques et universitaires » et
les crédits qui y sont consacrés ont également diminué en 2007.
Cette réduction, si elle se prolongeait, mettrait en danger la
politique d'attractivité de notre pays, qui ne peut être
efficace que dans la durée. En 2006, sur les 1.289 candidats qui
ont souhaité bénéficier d'une bourse Eiffel, seuls 402 ont pu
être sélectionnés, compte tenu du gel budgétaire. Mme Monique
Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis, a souligné
l'attrait du troisième cycle d'études supérieures pour les
étudiants étrangers et l'intérêt présenté par ces étudiants pour
notre pays. Entre 1999 et 2004, le nombre de doctorants inscrits
en France est passé de 61.600 à plus de 69.000. Cet
accroissement s'explique par l'afflux des étudiants étrangers (+
7,5 %) qui constituaient, en 2004, 28 % des doctorants dans des
matières scientifiques particulièrement sensibles.
S'agissant de l'action n° 5
« Service public d'enseignement à l'étranger », Mme Monique
Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis, a rappelé que les
établissements de l'Agence pour l'enseignement français à
l'étranger (AEFE) (73 en gestion directe et 178 conventionnés)
scolarisent 160.000 élèves avec un succès croissant, puisqu'au
cours des quinze dernières années, leurs effectifs ont augmenté
de près de 10 %. L'accroissement de la subvention de l'Etat en
2007 s'élève à près de 8,3 millions d'euros, mais elle ne
correspond qu'au solde du dégel dont l'AEFE a fait l'objet l'an
passé.
Le fonds de roulement global de
l'Agence, estimé à 130 millions d'euros fin 2005, tombe à
77 millions d'euros en 2006. Celui des établissements en gestion
directe (47,6 millions d'euros), doit être distingué de celui
des services centraux (28,9 millions d'euros). Le fonds de
roulement de chaque établissement, constitué par les familles,
est légitimement considéré par la communauté scolaire comme
représentant les économies de l'établissement. Il permet de
compléter la programmation immobilière et de faire face aux
aléas d'une gestion souvent tributaire d'un environnement
politiquement et financièrement instable.
La situation de l'AEFE est donc
financièrement fragile, ce qui ne lui permet pas de répondre aux
attentes exprimées par le ministre des affaires étrangères
lui-même. Enfin, l'AEFE, conformément au décret du 19 mai 2005,
s'est vu transférer des obligations en matière de gestion
domaniale, sans aucun soutien du ministère : la dotation promise
de 10 millions d'euros n'a pas été versée et aucune aide
budgétaire n'a été accordée à l'AEFE pour faire face à ses
nouvelles compétences immobilières sur un parc évalué, à terme,
à près de 600.000 m². L'AEFE doit donc recourir à des
prélèvements sur son fonds de roulement et à des emprunts
réalisés au coup par coup. Son besoin de financement pour
2006/2012 pour l'immobilier a été évalué, par une mission
d'audit, à 240 millions d'euros, qu'elle ne pourra pas financer.
Abordant les crédits du
programme 115, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur
pour avis, a déploré que ces crédits n'augmentent que de
70.000 euros, soit, selon le ministère, « une quasi-reconduction
du montant alloué en 2006 », alors que ce budget n'avait pas
augmenté d'un euro en 2006. Le programme 116, qui vise à
financer France 24, créée en 2005 par TF1 et France Télévisions,
bénéficie d'une dotation substantielle (70 millions d'euros en
2007), qui se révélera toutefois insuffisante compte tenu des
ambitions affichées par la chaîne. Il semblerait rationnel de
rassembler tous les opérateurs de l'audiovisuel extérieur
français, au sein peut-être d'un CAEF (conseil de l'audiovisuel
extérieur français), resté inactif depuis 10 ans et où les
parlementaires pourraient entendre leur voix.
Mme Monique Cerisier-ben
Guiga, rapporteur pour avis, a considéré que le budget des
relations culturelles extérieures pour 2007 n'attribuait pas de
« bons points aux bons élèves » : CFI (Canal France
international) qui, selon le ministère, « contribue à
l'influence française auprès du plus grand nombre en tant que
premier réseau de distribution de programmes français », voit sa
dotation réduite en 2007 de près de 10 millions d'euros.
Mme Monique Cerisier-ben
Guiga, rapporteur pour avis, a ensuite rappelé que les
établissements culturels constituaient l'un des meilleurs
vecteurs de la diffusion mondiale de la langue française et
s'autofinançaient grâce à leur activité de cours de langues, à
hauteur de 94,8 % en 2006. Le ministère des affaires étrangères
entend passer à un taux d'autofinancement de 100 % en 2010
(indicateur 4.2).
La diversité culturelle,
largement soutenue par la France, et qui favorise la diffusion
de la langue et de la culture françaises, a donné lieu à
l'adoption d'une convention de l'UNESCO, approuvée par le Sénat
en juin 2006. La mise en oeuvre de cette convention ne
bénéficiera, dans le budget 2007, que d'un soutien financier de
38 870 euros.
Le budget alloué à TV5 ne lui
permettra pas d'approfondir l'action « Apprendre et enseigner
avec TV5 », notamment par Internet », pourtant indispensable
support à l'apprentissage du français, et mettra également en
cause son projet de sous-titrage.
Mme Monique Cerisier-ben
Guiga, rapporteur pour avis, a indiqué que RFI a renégocié
son contrat de diffusion en ondes courtes avec TDF, réalisant
ainsi une économie de 34,5 millions d'euros sur cinq ans. Le
ministère des affaires étrangères estime pourtant que, RFI
bénéficiant ainsi d'une économie annuelle pérenne de 5 millions
d'euros sur sa « facture » ondes courtes, disposerait encore de
marges d'économies potentielles importantes, ce qui le conduit à
diminuer encore la dotation budgétaire de la station.
L'AFAA (association française
d'action artistique) vient de fusionner avec l'ADPF (association
pour la défense de la pensée française) pour donner naissance à
CulturesFrance. L'AFAA devait être dotée, cette année, de
8,99 millions d'euros, et Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
rapporteur pour avis, a déploré que la commission des
finances du Sénat souhaite réduire cette subvention de 700.000
euros.
L'Alliance française, a
poursuivi Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour
avis, vient de se réformer, en séparant ses activités
d'enseignement de l'animation de son réseau, et en créant une
Fondation, qui constituera la tête du réseau mondial des
alliances françaises et sera plus à même, statutairement, de
lever des fonds. Toutefois, l'Etat n'envisage pas de doter cette
Fondation. Un amendement de la commission des finances du Sénat
a opportunément accordé 1 million d'euros à l'Alliance
française.
Mme Monique Ceriser-ben
Guiga, rapporteur pour avis, a conclu que tous les services
et opérateurs qui servent la diffusion de la langue et de la
culture françaises à l'étranger, seraient contraints de réduire
leurs actions.
Elle s'en est enfin remise à la
sagesse de la commission pour l'adoption des crédits concernant
l'action culturelle extérieure de la mission « Action extérieure
de l'Etat ».
A l'issue de cet exposé, M.
Serge Vinçon, président, s'est dit favorable au rattachement
des actions culturelles du programme 209 au programme 185 et a
estimé logique qu'à terme, l'ensemble des instruments de la
politique audiovisuelle extérieure française, y compris France
24, soit regroupé dans un même programme pour en accroître la
lisibilité.
M. Charles Pasqua a
approuvé l'action tendant à promouvoir la pratique de la langue
française par les fonctionnaires de l'Union européenne, mais a
déploré que, dans les différentes enceintes européennes, des
fonctionnaires ou responsables politiques français choisissent
trop souvent de s'exprimer en anglais.
Mme Monique Cersisier-ben
Guiga, rapporteur pour avis, a relevé qu'une partie du
problème était liée à la réduction des crédits de traduction
simultanée, qui obligeait parfois certains orateurs à s'exprimer
directement en anglais.
Mme Catherine Tasca a
félicité Mme Monique Cerisier-ben Guiga pour la pertinence des
informations contenues dans son rapport. Elle a jugé
indispensable d'alerter le gouvernement sur la détérioration des
moyens financiers du ministère des affaires étrangères. Elle
s'est en particulier demandé si l'action culturelle extérieure
de l'Etat était encore considérée comme un outil majeur de notre
diplomatie. Elle a regretté que les efforts consentis par
certains opérateurs de notre action culturelle extérieure soient
systématiquement pénalisés au profit de nouvelles structures
dans une sorte de « fuite en avant » qui sacrifie l'existant :
la naissance de France 24 privilégie TF1, chaîne privée, aux
dépens de la création d'un groupe des opérateurs de
l'audiovisuel extérieur, et CFI, RFI, TV5 en sont affaiblies
d'autant. Les crédits de CulturesFrance sont amputés dès sa
naissance.
Mme Monique Cerisier-ben
Guiga, rapporteur pour avis, a indiqué qu'on ne pouvait
reprocher à l'AFAA une mauvaise gestion, mais qu'il convenait de
la renforcer en créant des postes de gestionnaires, en parallèle
des postes de responsables culturels. Elle a rappelé que, seuls,
18 % du budget de l'AFAA étaient consacrés « aux saisons
culturelles », considérées comme trop dispendieuses par
certains.
M. Michel Guerry a
estimé que la perte d'influence de la langue française n'est pas
avérée dans l'absolu : de plus en plus d'étrangers manifestent
leur souhait d'apprendre notre langue. En matière d'action
culturelle extérieure, il a estimé que le ministère des affaires
étrangères devait clarifier sa politique, notamment à l'égard
des centres culturels. Il s'est dit opposé aux amendements de la
commission des finances réduisant les crédits de l'AFAA.
M. Robert del Picchia a
estimé que l'idée d'une « holding » rassemblant les opérateurs
de l'audiovisuel devait être examinée avec une grande prudence,
à la lumière d'expériences étrangères peu convaincantes. Il a
estimé que la France avait besoin d'une chaîne telle que
France 24 pour contrebalancer l'influence de CNN ou de BBC World
International, cette nouvelle chaîne étant complémentaire de
TV5. En ce qui concerne le réseau culturel, si certains centres
démontrent leur efficacité par leurs résultats, tel n'est pas le
cas de tous. RFI doit être aidée mais, pour vraiment étendre son
influence, elle doit développer sa diffusion en modulation de
fréquence au niveau mondial. Il s'est par ailleurs interrogé sur
la pertinence, pour RFI, de continuer à diffuser dans un aussi
grand nombre de langues. Il a enfin estimé que, pour l'AEFE, le
mécanisme des partenariats public/privé permettait de réels
progrès d'investissements.
Mme Monique Cerisier-ben
Guiga a souligné la nécessaire cohérence des observateurs
audiovisuels extérieurs (Arte, EuroNews, TV5, RFI), aujourd'hui
beaucoup trop dispersés. Il était temps de rationaliser une
structure qui s'apparente à un « millefeuille ».
Mme Hélène Luc a exprimé
son accord avec les observations de Mmes Monique Cerisier-ben
Guiga et Catherine Tasca et appelé la commission à manifester
son désaccord en votant contre le budget de l'action extérieure.
M. Charles Pasqua a
souhaité que la commission des affaires étrangères engage une
mission d'information approfondie sur ces questions de l'action
culturelle extérieure.
A l'issue de ce débat, M.
Serge Vinçon, président, a reconnu les interrogations
ponctuelles que certains aspects des crédits consacrés,
notamment, à l'action culturelle extérieure, pouvaient poser,
mais a souligné néanmoins que, globalement, le projet de budget
2007 pour la mission « Action extérieure de l'Etat » était
construit pour accompagner le travail remarquable que conduit la
diplomatie française, très présente et active dans le monde et
dont on ne peut que saluer le rôle et l'influence dans la
gestion des crises, comme l'actualité l'avait amplement
démontré. Il a estimé qu'il convenait d'avoir cette réalité
présente à l'esprit et a invité la commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées à adopter ces
crédits.
La commission a alors adopté
les crédits de la mission « Action extérieure de
l'Etat » ainsi que les crédits de la mission
interministérielle « Aide publique au développement ».
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