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Mission action extérieure de l’Etat, refondation des bourses et réforme de la représentation des Français de l’étranger

Je devais intervenir dans la discussion sur l’examen des crédits de la mission Action extérieure de l’Etat. Mais, la première partie de la loi de Finances pour 2013 ayant été rejetée, aucune mission budgétaire ne sera examinée par le Sénat. Je me propose donc de faire un tour d’horizon des points que je souhaitais évoquer devant les ministres Laurent Fabius et Hélène Conway.

La mission Action extérieure de la France doit elle aussi, sans doute, participer à l’effort de réduction des dépenses publiques qu’a engagé notre gouvernement après les dérapages du précédent quinquennat. Mais, comme l’a rappelé M. Fabius, ce budget doit aussi tenir compte des efforts imposés, dans le passé, au ministère des Affaires étrangères. Dans ces conditions, cette participation, toute légitime, à l’effort global de réduction de notre déficit doit aussi s’effectuer dans un esprit de justice et de répartition équitable.

Dès son arrivée au gouvernement, la ministre Hélène Conway a lancé trois chantiers: la modernisation du réseau consulaire, ainsi que la réforme des bourses et la représentation des Français à l’étranger, que je souhaite examiner plus précisément ici.

Conformément à l’engagement du Président de la République, la prise en charge des frais de scolarité des lycéens a été supprimée. François Hollande s’était engagé à la remplacer par une aide à la scolarité sur critères sociaux ouverte à tous les élèves. Il a respecté ce deuxième engagement puisque les crédits sont bien reversés sur les bourses dans le cadre du triennum budgétaire. Les bourses sont ainsi portées à 110 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2013. Et elles s’élèveront à 118 millions pour 2014 et 125,5 millions en 2015.

La seconde branche de l’engagement de François Hollande était d’ouvrir l’accès au réseau dans la justice et l’équité. C’est l’objectif que poursuit, aujourd’hui, la réforme du système des bourses.

Cette refondation des critères d’attribution doit, tout à la fois, permettre d’ouvrir le dispositif à plus de familles, de façon plus transparente et plus équitable, en prenant davantage en considération les coûts de la vie locale, et s’inscrire dans le cadre budgétaire. Pour ce faire, le système retenu repose sur la détermination d’un quotient familial pondéré par le nombre de part de la famille et par un indice de parité de pouvoir d’achat.

A l’occasion des réunions de la Commission nationale des bourses qui a travaillé sur le projet soumis par l’AEFE et le MAE, a été pris en considération un certain nombre de craintes exprimées, notamment par nos élus, aux premières loges pour évaluer autant que faire se peut les « effets réels » de la réforme sur les milliers de familles concernées. Ainsi je me félicite que l’on nous ait entendus sur plusieurs points, tels que la détermination quotient familial minimal en deça duquel une bourse à 100% est automatiquement attribuée, l’augmentation de la part prise en compte par enfant supplémentaire de 0,2 à 0,5, ou encore une meilleure prise en compte de toutes les situations familiales, familles monoparentales ou recomposées…

Il reste que de nombreuses inquiétudes persistent : un grand nombre de familles va perdre, d’une année sur l’autre, le bénéfice de la bourse à 100%. Et plus généralement, même si les familles n’auront pas à subir de baisse de quotité de bourses supérieure à 20 points (le projet initial envisageait jusqu’à 30 points de baisse), il est indéniable que le choc sera rude pour nombre d’entre elles, en particulier dans certains pays, comme l’Espagne, les Etats-Unis ou l’Allemagne. En outre, il est fort probable, que leur situation financière ne leur permette pas davantage de « s’adapter » l’année suivante, alors même que la mesure exceptionnelle limitant la baisse de quotité à 20 points sera caduque.

La finalité première de la réforme réside dans l’élargissement à un plus grand nombre de familles de l’accès aux bourses. Mais cette réforme doit-elle se faire au détriment d’autres, sans doute plus nombreuses qu’on ne veut le croire, contraintes de facto de déscolariser leurs enfants du réseau d’enseignement français ? La prochaine année scolaire doit avant tout être une année d’expérimentation qui nous éclaire précisément et sincèrement sur les conséquences concrètes de la réforme, au-delà des graphiques, pourcentages et autres diagrammes très virtuels. Prenons garde, en voulant bien faire, à ne pas galvauder le système même des bourses!

L’autre chantier engagé par la ministre est la réforme de la représentation des Français de l’étranger. Nous souscrivons parfaitement à la modernisation de l’Assemblée des Français de l’étranger, dont la structure même date de plus de soixante ans. A cet égard, plusieurs propositions de loi ont déjà été déposées depuis plusieurs années, notamment par les sénateurs socialistes.

Par ailleurs, l’AFE elle-même a exprimé, à l’unanimité de ses membres, un avis en septembre dernier.

Je ne m’étendrai pas sur cette réforme en cours, dont nous ne connaissons que les grandes lignes, mais il me semble que c’est sur la base de l’avis des premiers intéressés que doit se construire le canevas de cette nouvelle représentation.

Ainsi, on peut encore améliorer la représentativité des élus des Français de l’étranger en les rapprochant davantage des électeurs. L’élection de délégués consulaires est donc bienvenue, d’autant plus qu’elle permettra d’élargir le collège électoral des sénateurs des Français de l’étranger, particulièrement étroit.

Mais pour que ces délégués soient réellement les garants de la démocratie de proximité que l’on nous propose, ils doivent, non seulement, reprendre les attributions des différents comités consulaires (CLB pour les bourses, CCPAS pour l’action sociale, CCPEFP pour l’emploi et la formation professionnelle…) et aussi voir leurs compétences élargies. Je pense, par exemple, à leur consultation systématique lors des négociations de conventions fiscales ou de sécurité sociale.

Pour ce qui concerne les membres de l’Assemblée des Français de l’étranger, il importe, en premier lieu, qu’ils soient tous élus, les parlementaires demeurant membres de droit avec voix consultative, et aussi qu’ils élisent leur président. Mais, il me semble que la réforme n’aurait pas de sens, si ce « souci d’une meilleur représentativité des Français de l’étranger » ne débouchait pas, également, sur la reconnaissance de véritables compétences : une consultation obligatoire sur tous les sujets intéressant les Français vivant hors de nos frontières, dont l’enveloppe budgétaire qui leur est attribuée, et un pouvoir délibératif dans un certain nombre de domaines, bourses scolaires, action sociale et emploi, où sont reprises les attributions des commissions dédiées.

Je ne doute pas que les élus à l’Assemblée des Français de l’étranger, qui accomplissent un travail remarquable, sans beaucoup de moyens, sans beaucoup de reconnaissance non plus, sont prêts à la réforme de leur assemblée. Seulement ils ne souhaitent pas être « les dindons de la farce ». Mais, je ne doute pas davantage que notre ministre déléguée mènera cette réforme, utile et nécessaire, dans le respect des élus et que l’avis qu’ils ont adopté à l’unanimité sera pris en considération.

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