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Débat sur le rayonnement culturel de la France à l’étranger: mon intervention en séance

Je suis intervenue dans le cadre d’un débat organisé sur le rayonnement culturel de la France à l’étranger. Mon intervention est retranscrite ci-dessous et je vous invite à consulter ici l’ensemble de la discussion et les réponses et précisions apportées par le ministre des Affaires étrangères.

Mme Claudine Lepage. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous comptons 478 établissements d’enseignement français dans 130 pays, fréquentés par 310 000 élèves, dont les deux tiers sont étrangers, 101 instituts français, 125 antennes d’instituts français et 900 Alliances françaises dans 161 pays, 11 centres ou instituts franco-nationaux, 27 instituts français de recherche à l’étranger, 161 services de coopération et d’action culturelle, 10 services pour la science et la technologie, 135 espaces Campus France…

Inutile de poursuivre l’énumération : la France possède, encore, l’un des réseaux culturels les plus denses du monde. Il s’agit d’un atout formidable pour notre pays !

C’est bien la culture et la langue française qui font notre force à l’étranger, cette « influence douce », je n’ose dire soft power, qui contribue assurément à la place de la France dans le monde et constitue, avec notre politique d’exception culturelle, la « marque de fabrique » de la diplomatie française.

Mais, depuis plusieurs années, le cœur n’y est plus ; un profond mal-être est apparu. Certes, la présidence de Nicolas Sarkozy a pâti d’une absence de vision stratégique dans ce domaine essentiel. À cet égard, la réforme de l’action extérieure de l’État, en 2010, n’a pas rempli son objectif. Le nouvel Institut français peine à mettre en place une politique ambitieuse, notamment en matière de coopération. Je ne développerai pas plus avant ce sujet, notre collègue Jean Besson l’ayant déjà traité.

D’autres vecteurs permettent à la France de déployer sa culture, sa langue, mais aussi ses valeurs sur tous les continents. Je pense à la société Audiovisuel extérieur de la France, AEF, qui chapeaute la troisième radio internationale, RFI, la chaîne d’info internationale France 24 et Monte Carlo Doualiya, sans oublier la chaîne partenaire TV5 Monde, première chaîne mondiale de télévision en français.

André Vallini en a déjà très bien parlé, mais je ne résiste pas à l’envie d’évoquer la situation de AEF, que je connais particulièrement bien, en ma qualité d’administratice de cette société, et de saluer le travail de sa nouvelle présidente, Marie-Christine Saragosse, qui, en quelques mois, a su redonner espoir aux salariés durement éprouvés par l’ère Sarkozy-de Pouzilhac.

Pour ce qui concerne l’enseignement français à l’étranger, nous revenons également de loin. En effet, la prise en charge des frais de scolarité mise en place par Nicolas Sarkozy n’a fait qu’accentuer les inégalités, excluant les familles des classes moyennes, mais aussi les familles étrangères, en fait toutes celles qui ne pouvaient effectivement pas supporter l’augmentation faramineuse des coûts de scolarité pour tous les autres élèves, ceux qui ne bénéficiaient pas de la gratuité et n’entraient pas dans le cadre d’attribution des bourses scolaires.

Dans le souci de redonner à l’enseignement français à l’étranger ses objectifs de justice et de mixité sociale, mais aussi d’universalité et d’influence, l’une des premières mesures de François Hollande a donc été la suppression de la prise en charge des frais de scolarité des Français de l’étranger, ou PEC.

Je terminerai en évoquant cependant une inconnue qui demeure quant aux suites qui seront réservées à l’arrêt Chauvet, rendu en mars 2012 par la cour administrative d’appel de Paris. Cette décision de justice souligne que l’AEFE a l’obligation, dans ses établissements en gestion directe, d’inscrire tout élève français dont la famille le demande et seulement une obligation dite « de moyens » pour les enfants non français. Ces derniers ne peuvent ainsi être accueillis que dans la limite des places disponibles, qui s’entendent alors comme les places non susceptibles d’être occupées par les petits Français.

Aux côtés de ces inconnues judiciaires, il nous faut aussi évoquer la position de la Commission européenne sur la non-discrimination entre citoyens des États membres de l’Union qui, si elle se confirmait, induirait de profonds bouleversements au sein de notre dispositif d’enseignement français à l’étranger et de notre système d’aides à la scolarité.

Compte tenu de ces différentes incertitudes, je me réjouis que Mme la ministre déléguée ait constitué une mission de réflexion et de proposition sur l’avenir de notre réseau d’enseignement français à l’étranger, à laquelle je souhaite, bien sûr, activement collaborer. Nous sommes tous conscients de la nécessité absolue de réfléchir à la mise en œuvre d’une nouvelle politique scolaire à l’étranger, capable de relever les défis auxquels est et sera confronté notre réseau tout en maintenant sa double fonction, la scolarisation des enfants français, bien évidemment, mais aussi sa mission d’influence, pour que de futurs Boutros Boutros Ghali, Jodie Foster ou Atiq Rahimi fréquentent encore nos établissements et deviennent ambassadeurs de notre langue et de notre culture !

(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Michel Le Scouarnec applaudit également.)

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