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Elections des députés représentant les Français établis hors de France: dernières dispositions votées au Sénat

Deux projets de loi relatifs à l’élection des députés représentant les Français établis hors de France ont été adoptés ce 2 mars par le Sénat. Il s’agit du projet de loi organique relatif à l’élection des députés et des sénateurs et du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2009-936 du 29 juillet 2009 relative à l’élection de députés par les Français établis hors de France. Le premier de ces textes traite, notamment, du régime des inéligibilités spécifiques qui doivent être appliquées aux candidats dans les circonscriptions de l’étranger. Le second fixe les conditions du déroulement de la campagne électorale et des opérations de vote au regard de la spécificité d’une consultation hors du territoire national.

J’avais déposé, avec me collègues Richard Yung et Monique Cerisier ben Guiga plusieurs amendements destinés à  prendre davantage en considération les multiples particularités de ces élections.

L’amendement destiné à compléter la liste des inéligibilités n’a pas été adopté. Dans ces conditions, ne pourront faire acte de candidature, bien évidemment, les chefs de mission diplomatique et de poste consulaire ainsi que leurs adjoints, ou encore les chefs et leurs adjoints de mission militaire. Je me félicite qu’il en soit de même pour les consuls honoraires dont l’influence aurait, sans aucun doute, altéré la sincérité du scrutin et l’égalité entre les candidats. Par ailleurs, ne pourront être élus, le secrétaire général du MAEE, ou encore le directeur des Français à l’étranger au MAEE ou le secrétaire général de l’AFE.
En revanche, aucune inéligibilité ne sera donc prévue pour les responsables des organismes et agences intervenant à l’étranger tels que l’AEFE, la MLF, l’Institut Français, la fondation Alliance Française, l’AFD, la CFE, ou encore le Comité national des conseillers du commerce extérieur, ou l’Union des chambres de commerce et d’industrie française à l’étranger. Cette situation est d’autant plus dommageable qu’elle révèle une occasion manquée de rapprocher  les règles applicables aux Français de l’étranger de celles de leurs compatriotes établis en France.

– En ce qui concerne le déroulement de la campagne électorale, je me réjouis que notre amendement prévoyant la mise à disposition par l’Etat français non seulement des locaux diplomatiques et consulaires, mais aussi ceux des établissements culturels et scolaires, ait été voté.
Les dispositions adoptées relatives au compte de campagne ne prennent, en revanche, pas suffisamment en considération la spécificité d’un scrutin se déroulant à l’étranger.
D’une part, au regard de la taille exceptionnelle des circonscriptions, et donc de l’importance des dépenses relatives aux déplacement des candidats, il aurait été opportun, non seulement de plafonner les remboursements des frais de transport mais au-delà, comme nous l’avions proposé (voir notre amendement), d’en plafonner les dépenses à proprement parler.
D’autre part, les dispositions du code électoral relatives à la conversion en euros des dépenses et recettes des candidats auraient aussi mérité d’être adaptées: il est nécessaire de pallier tout risque de dévaluation de la devise étrangère dans laquelle a été réalisée une opération effectuée en vue de l’élection. Pour cela, il convenait, comme le proposait notre amendement rejeté, de faire correspondre le taux de conversion avec le taux de chancellerie au jour de l’opération.
Quant à la possibilité d’autoriser les candidats à  présenter les pièces justificatives relatives à la nature, au montant et aux paiement des dépenses engagées dans une langue autre que le français, elle semble évidente (voir notre amendement). De nature réglementaire, il importe que cette disposition soit bien prévue par le décret d’application.

Les opérations de vote nécessitent aussi un certains nombre d’adaptations. Ainsi, pour parvenir à un taux de participation satisfaisant il est essentiel, que chaque Français dispose du choix de se rendre physiquement dans un bureau de vote ouvert au sein de sa propre circonscription consulaire (voir notre amendement). La disposition prévoyant la possibilité pour une ambassade ou un poste consulaire d’organiser les opérations de vote,  « pour le compte de plusieurs circonscriptions », n’est donc pas satisfaisante. A nouveau, il nous faudra nous assurer que le décret sera suffisamment stricte quant à la justification de la nécessité de ce regroupement.
Le vote par correspondance est, bien sûr, indispensable à une participation satisfaisante de nos compatriotes. Mais  pour prévenir toute dérive, tel que le dépôt groupé, nous avons proposé un amendement visant à limiter à 3 le nombre de plis fermés qu’une même personne peut directement remettre aux autorités responsables du vote. Nous devrons aussi veiller à ce que le gouvernement pourvoie correctement à cette disposition réglementaire.

Ces textes doivent encore faire l’objet d’une nouvelle lecture par l’Assemblée nationale. Puis les dispositions réglementaires, dont nous avons vu qu’elles devaient encore préciser plusieurs points essentiels, pourront être prises. Souhaitons que ce processus soit vite achevé, afin que  les candidats disposent, le plus tôt possible, du cadre juridique de ces premières campagnes électorales hors du territoire national.

Vous trouverez ci-dessous le texte de mon intervention:

« Monsieur le président, Monsieur le Ministre, chers collègues,

La constitution reconnait enfin, depuis la réforme de juillet 2008, aux quelques 2 millions de Français établis à l’étranger, une pleine citoyenneté. Et il aura fallu plus de deux ans et demi, pour parvenir à l’issue du processus législatif qui met en place ces 11 nouveaux sièges de députés des Français de l’étranger.

Mon propos portera, vous l’avez compris, sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2009-936 relative à l’élection de députés par les Français établis hors de France. Ces députés ont vocation, à l’instar des autres députés, à représenter l’intégralité de la Nation. Pourtant, leur particularité d’être élus hors du territoire national requiert certaines adaptations.

Le texte que nous a transmis l’Assemblée nationale ne prend peut-être pas suffisamment en compte ces spécificités propres à la conduite d’une campagne électorale et au déroulement d’élections hors de notre territoire. Plusieurs amendements, rédigés à la lumière de notre expérience, viennent combler cette lacune.

Nous devons absolument adapter les règles relatives au financement de la campagne électorale. La taille des circonscriptions est sans commune mesure avec celle des circonscriptions en France métropolitaine ou même en Outre-mer. Rappelez-vous que la 11è circonscription, par exemple, couvre à la fois l’Europe de l’Est, l’Asie et l’Océanie. Certes, à bien des égards, le découpage électoral aurait pu être meilleur…mais c’est un débat malheureusement clos.  Au regard de cette considération territoriale, et dans le souci d’assurer l’égalité entre les candidats, il faut impérieusement aller au-delà du plafonnement des remboursements et prévoir un plafonnement des dépenses à proprement parler. C’est l’objet de l’amendement que nous déposons avec mes collègues Monique Cerisier ben Guiga et Richard Yung.

Plus techniquement, les dispositions du code électoral relatives à la conversion en euros des dépenses et recettes des candidats doivent aussi être revues. Il est, en effet, nécessaire de pallier tout risque de dévaluation de la devise étrangère dans laquelle a été réalisée une opération effectuée en vue de l’élection. Pour se faire, il convient de faire correspondre le taux de conversion avec le taux de chancellerie au jour de l’opération.

Par ailleurs, pour parvenir à un taux de participation satisfaisant il est essentiel, que chaque Français puisse avoir le choix, au moins symbolique, de se rendre physiquement dans un bureau de vote ouvert au sein de sa propre circonscription consulaire. Ainsi, la disposition prévoyant la possibilité pour une ambassade ou un poste consulaire d’organiser les opérations de vote,  « pour le compte de plusieurs circonscriptions », même si cette possibilité doit être, comme l’a souligné M. de la Verpilliere « réservée à des cas très exceptionnels » n’est pas satisfaisante.

Concernant justement ces opérations de vote, l’article L.330-13 du code électoral prévoit le vote par correspondance (sous pli fermé ou par voix vote électronique). Je me félicite de cette possibilité dérogatoire au droit commun, même si je comprends les réticences exprimées. Mais serions-nous donc plus fraudeurs que nos voisins espagnols ou allemands qui ont l’expérience de ce vote ? Pour prévenir toute dérive tel  que le dépôt groupé, nous proposons un amendement qui vise à limiter à 3 le nombre de plis fermés qu’une même personne peut directement remettre aux autorités responsables du vote. Le vote par internet doit, lui aussi, être entouré des plus grandes précautions et sa mise en œuvre trouver le juste équilibre entre sécurité et simplicité.

Je terminerai en me félicitant de l’article 3 qui prévoit que les députés sont membres de droit de l’AFE et peuvent ainsi utilement relayer à l’Assemblée nationale les propositions des conseillers, élus de terrain les mieux placés pour connaître les problèmes locaux. Article 3 qui prévoit également que ces députés font partie du corps électoral des sénateurs, comme cela est le cas pour votre élection à chacun, chers collègues. Cependant, j’entends bien l’objection liée au poids de ces 11 députés qui représentent 7% du collège électoral. Cette situation ne rend en fait que plus criante la nécessité d’élargir ce collège électoral des sénateurs des Français de l’étranger, dans le sens de la proposition de loi que j’ai déposée avec Richard Yung et Monique Cerisier ben Guiga.

Les élections des députés des Français établis hors de France représentent une grande avancée pour la reconnaissance de la pleine citoyenneté de tous les Français, où qu’ils résident. Il nous appartient de prendre toutes les dispositions pour que ces premières élections se déroulent dans de bonnes conditions. Ce projet de loi de ratification, enrichi des adaptations nécessaires à la particularité de cette consultation doit pouvoir répondre à cette exigence. « 

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