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Situation en Syrie: un débat de qualité au Parlement

SyrieLe Parlement s’est réuni hier après-midi afin de débattre d’une éventuelle intervention en Syrie. Au Sénat, nous avons entendu le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius qui a débuté la séance par un rappel des faits : le 21 août dernier, 1500 civils dont des centaines d’enfants sont morts en Syrie des suites d’une attaque au cours de laquelle ont été utilisées, comme l’attestent  des vidéos témoignant du drame et l’absence de blessures visibles, des armes chimiques.

Pour le gouvernement il est également certain que c’est l’armée syrienne qui a usé de ces armes, et non les rebelles, lesquels ne disposent pas de tels moyens. Par ailleurs, l’offensive du 21 août portait sur des zones stratégiques que l’armée syrienne souhaitait reconquérir. Si l’usage d’armes chimiques fait l’objet d’un rapport que doivent rendre les Nations Unies, l’organisation internationale n’est pas mandatée pour identifier les coupables de cette attaque. Le rapport ne nous fournira donc pas de nouvelles informations sur le fait de savoir si le régime syrien est ou non responsable, mais les services secrets français et d’autres pays européens sont formels.

Au regard des probables vetos russe et chinois, l’ONU sera vraisemblablement empêchée de mandater une opération militaire. Pour Laurent Fabius, il est cependant clair que la France ne peut pas ne pas réagir, car « ce serait adresser à Bachar al Assad et au peuple syrien un message terrible », celui que l’usage d’armes chimiques peut rester sans conséquence. Cela fermerait par ailleurs la porte à un règlement politique de la situation syrienne, toute concertation étant inenvisageable tant qu’Assad se sentira hors d’atteinte. L’idée d’une intervention n’est donc pas de faire tomber le régime et de régler la situation par la voie militaire, mais plutôt de montrer au dirigeant syrien qu’il n’y a pas d’alternative à la négociation. Il s’agit donc, en somme, de le contraindre par une intervention militaire à s’asseoir à la table des négociations politiques. Le ministre a ajouté que la France ne peut agir que par une « action réfléchie et collective, ferme et raisonnée » et de courte durée.

A gauche, les sénateurs ont appuyé la position du ministre, en ajoutant des éléments, notamment le chiffre de deux millions de Syriens ayant fui leur pays depuis le début de la guerre civile, et de plus de quatre millions de déplacés à l’intérieur du pays. A été souligné le fait qu’une intervention hors mandat de l’ONU, loin de porter atteinte à la légitimité de l’organisation, redonnerait en réalité du poids à une organisation trop souvent empêchée d’agir. Par ailleurs, les sénateurs ont rappelé qu’envisager un vote du Parlement apparaît pour le moment prématuré, alors que la position de nos alliés et notamment des Etats-Unis n’est pas encore définie.

A droite, les sénateurs se sont exprimés pour un vote du Parlement et contre une intervention militaire, au motif que rien ne garantit que l’actuel régime puisse être remplacé par un régime plus démocratique. Il faut selon eux agir, mais il ne faut pas attaquer. L’absence de mandat onusien est également invoquée comme raison de ne pas intervenir, ainsi que, plus largement, l’isolement de la France. Si ces arguments s’entendent, on peut néanmoins s’interroger sur une posture qui semble davantage dictée par un rejet de la position gouvernementale que par une ligne politique claire. L’extrême-gauche a par ailleurs défendu une position similaire à celle des sénateurs de droite.

Le ministre a clos le débat en soulignant les trois points essentiels qui s’en sont dégagés. D’abord, l’absence de contestation sur les faits (usage d’armes chimiques et imputabilité de cet usage au régime syrien), élément décisif eu égard notamment à la position de la Russie, qui affirme être prête à soutenir militairement une intervention si les faits sont avérés. Ensuite, le fait que la France est concernée. Enfin, la certitude que la sanction militaire n’est pas contradictoire avec la recherche d’une solution politique mais en est au contraire la condition.

Ce débat a, en définitive, essentiellement confirmé les clivages politiques dans les deux hémicycles du Sénat et de l’Assemblée nationale. Je salue, pour ma part, la détermination et le courage du Président de la République quant à cette décision qui, si difficile qu’elle soit, constitue un jalon décisif pour la recherche d’une résolution politique à cette terrible crise.

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