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Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA): mon intervention lors de l’audition de M. Curien par la commission de la Culture

Com cultLa commission de la culture  a procédé à l’audition de Nicolas Curien, candidat désigné par le Président du Sénat, Gérard Larcher, pour siéger comme membre du CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel), en application de l’article 2 de la loi du 15 novembre 2013 relative à l’indépendance de l’audiovisuel public. Sa candidature a été validée par 47 voix « Pour » et 1 voix « Contre ».

Vous pouvez lire ci-dessous mon intervention et les réponses de M. Curien.

Visionner ici la vidéo des questions des membres de la commission et ici l’intervention de M. Curien.

Mme Claudine Lepage. – Je souhaite revenir sur la réaction du CSA, suite aux événements tragiques que nous venons de connaître.

Dès vendredi, le Conseil avait adressé une note aux rédactions pour leur rappeler d’indispensables précautions de comportement. Il manifeste aujourd’hui sa volonté d’ « examiner, dans le cadre de ses pouvoirs de contrôle, contradictoirement, les manquements qu’auraient pu commettre certains des médias audiovisuels ».

Et ce lundi, le CSA a indiqué avoir mis en place un suivi du traitement des médias audiovisuels et a décidé de convier demain jeudi les télévisions et les radios assurant une fonction d’information à une réflexion commune sur les questions et les difficultés qui ont pu être soulevées par l’accomplissement de leur mission.

En ma qualité de rapporteure de l’audiovisuel extérieur, je serai particulièrement attentive aux résultats de cette réflexion, ainsi qu’aux décisions qui pourraient être prises. Je pense bien sûr aux médias français à vocation internationale qui sont particulièrement susceptibles d’être confrontés à de telles circonstances dramatiques dans la couverture d’événements internationaux qu’ils opèrent. Mais également à des médias étrangers diffusant en France.

Je vous remercie de bien vouloir nous indiquer de quelle façon vous envisagez le difficile équilibre entre, d’une part, le devoir d’information des médias face un public toujours plus exigeant au regard de la multiplication de ses sources et de l’instantanéité de l’information et, d’autre part, le nécessaire et parfois salutaire, discernement dont ils doivent faire preuve dans certaines occasions.

Concernant les médias étrangers, le CSA explique que dans la pratique du contrôle qu’il exerce sur les chaînes extra-européennes, il est particulièrement vigilant au respect des obligations liées aux grands principes fixés aux articles 1er et 15 de la loi de 1986 (prohibition de l’incitation à la haine, respect de la dignité de la personne humaine, protection de l’enfance…) Mais, et je profite ici de votre expertise spécifique en télécommunications, pouvez-vous nous éclairer sur les moyens pratiques dont disposerait le CSA pour faire cesser d’éventuels manquements.

M. Nicolas Curien. – À propos de la régulation économique, le CSA a recours à des études d’impact comme la loi de 2013 lui en a ouvert la possibilité, afin d’établir une balance entre les avantages et les inconvénients. Concernant LCI, Paris Première et Planète+, le CSA a examiné en particulier l’effet du passage à la TNT gratuite sur les recettes publicitaires pour établir une analyse coûts-bénéfices. Il n’a pas abusé de ses compétences. Un appel ayant été interjeté auprès du Conseil d’État, il convient d’attendre sa décision. J’observerai cependant que le CSA a des pouvoirs de régulation très faibles par rapport à l’ARCEP, même si le fait qu’il n’en avait pas auparavant peut laisser penser que son rôle s’est fortement accru. L’ARCEP, pour sa part, peut imposer des obligations structurantes aux opérateurs de communication. On peut discuter le fait de déléguer des pouvoirs à une autorité indépendante mais une fois que ceux-ci ont été délégués, ils doivent être exercés. Je ne suis pas choqué, par ailleurs, que le CSA indique dans son rapport annuel les modifications législatives qu’il conviendrait d’apporter afin d’améliorer encore la régulation du secteur.

Concernant le rapprochement de l’ARCEP et du CSA, on peut imaginer beaucoup de choses. Le pire scénario serait sans doute de maintenir les deux structures et de leur adjoindre un niveau supplémentaire chargé de la coordination.

Il serait logique de fusionner les deux entités à périmètre constant, ce qui donnerait lieu à la constitution d’une autorité considérable, dont les compétentes iraient de la nomination des responsables de l’audiovisuel à la régulation de La Poste. Une telle évolution nécessiterait de recentrer ses compétences, ce qui aurait pour effet une déstabilisation qui n’apparaît pas souhaitable. À long terme, un tel rapprochement pourrait néanmoins faire sens comme le montrent les dispositifs en vigueur aux États-Unis et au Royaume-Uni.

Il existe d’autres schémas possibles comme celui consistant à distinguer deux instances, l’une relative à une régulation technique en rassemblant les compétences de l’ARCEP et certaines compétences du CSA, et l’autre relative à une régulation des contenus en rassemblant des compétences du CSA, de la CNIL et de l’HADOPI. La véritable question consiste à savoir ce que l’on veut faire et ce qui est efficace.

Pour ce qui est des missions et des valeurs de France Télévisions, il faut distinguer deux choses : la relation contractuelle qui existe en l’État et France Télévisions et le suivi de l’application de ces dispositions, qui incombe au CSA, lequel n’est pas chargé de définir les missions de France Télévisions. Je considère pour ma part comme très importantes les missions de France Télévisions à l’égard de la création, de l’innovation et de la production de contenus. J’accorde aussi de l’importance aux objectifs en matière de diversité et de parité. J’observe que dans son rapport sur France Télévisions, le CSA a positivé ses critiques en plaidant pour une meilleure distinction entre les chaînes et un ancrage régional renforcé pour France 3. Il a également appelé au développement de synergies en matière d’information entre le nouveau site francetv.info et les rédactions de France 2 et France 3. Je considère que la mission qui incombe aux présidents de sociétés publiques de l’audiovisuel est difficile car leurs moyens sont restreints du fait de la contrainte budgétaire forte alors que les objectifs définis par les cahiers des charges sont ambitieux.

J’ai commencé à entendre parler de la radio numérique terrestre en 1990, à une époque où on imaginait qu’elle donnerait lieu à un basculement complet sur le mode de la TNT. En réalité la logique est différente, il existe des radios numériques sur Internet mais il est nécessaire de constituer des multiplex pour permettre la RNT, ce qui est difficile techniquement du fait de la multiplicité des acteurs. Cela peut néanmoins constituer un service d’appoint, notamment pour les nouveaux acteurs. Les choses sont lancées, car la loi invite le CSA à organiser un appel d’offres.

Enfin, concernant les questions de M. Jean-Pierre Leleux et Mme Claudine Lepage sur le devoir de responsabilité morale des médias, j’ai lu le communiqué du CSA et je crois que ce sujet peut progresser grâce à une régulation participative. Il y a un conflit entre deux objectifs : la nécessité de préserver la pluralité de l’information et l’impératif de discernement qui s’impose aux diffuseurs. Ce sujet me tient à coeur, je crois beaucoup à la régulation participative et au fait que les bonnes pratiques pourront émerger des différents échanges.

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