Ces échanges sur l’homoparentalité – lus sur le forum de la FFE-PS – m’ont intéressée car, par-delà les vieux réflexes, ils abordent intelligemment un débat difficile. Merci à Christophe Monier, de New York, d’avoir posé aussi clairement et simplement les termes du débat.
Cher M,
Je suis tres heureux de te retrouver desormais sur le Forum apres nos nombreuses conversations new yorkaises.
Sur l’adoption, je ne partage toutefois pas ta vision des choses. L’important dans une demande d’adoption c’est de considerer la qualite du projet familial. Pour avoir vecu toutes les demarches aux cotes d’amis heteros, je peux te garantir qu’il ne s’agit en rien d’un caprice passager. Il faut etre tenace et avoir une volonte de fer et un couple solide pour arriver a bout d’une procedure d’adoption internationale.
Ouvrir l’adoption aux couples homosexuels ne signifie pas pour autant que leur parcours sera facile, considerant que les adoptions se font essentiellement a l’etranger, et que nombre pays ne vont pas se precipiter pour favoriser l’adoption par des couples homosexuels. Les caprices s’evanouiront tres vite et seuls resteront les projets aux motivations solides.
Parler de caprice comme tu le fais pour evoquer l’adoption, c’est assez injuste car je connais bien plus d’enfants nes de caprices dans les couples heteros. Combien d’enfants concus dans l’espoir de racommoder un couple en difficulte? avec le taux de succes que nous connaissons…
Des etudes ont ete faites sur les enfants qui ont grandis dans des familles homos et elles montrent finalement que c’est la qualite de la cellule familiale qui prime bien plus que le sexe des parents. Bien sur, je n’ignore pas les difficultes supplementaires que la situation engendre, mais les enfants de couples bi-raciaux, de parents handicapes, etc connaissent aussi la difficulte du regard de l’autre et de la discrimination, et doivent surmonter ses difficultes.
Je suis, comme toi, contre le droit au caprice, et pour des politiques qui favorisent les projets familiaux solides. Mais je ne considere pas une famille ou les deux parents sont de meme sexe necessairement moins capable de porter un projet d’adoption qu’une famille ou les parents sont de sexe different. Je serais en revanche plus regardant sur les adoptions par des celibataires en general.
Enfin sur l’opportunite du debat en 2007, je ne crois pas que nous puissions le comparer a la situation aux etats-unis en 2004. Il y a ici aux etats-unis une droite hyper conservatrice et religieuse que de tels combats galvanisent. Notre extreme-droite trouve sa force dans un populisme different, et la place des integristes religieux y est bien moindre qu’aux Etats-Unis.
Bien sur le chomage, la desesperance sociale doivent avoir priorite. Mais l’action politique doit couvrir tout le champ de la societe. Le chomage etait deja eleve en 1981: nous aurions encore la peine de mort et la penalisation de l’homosexualite si nous nous en etions tenus aux priorites du moment depuis 25 ans.
Bien Amicalement,
Christophe Monier New York
Cher E,
Pour faire suite a ta demande, voici quelques references d’etudes sur le sujet des enfants de parents homosexuels. Desole, certaines sont en anglais et la plupart des autres viennent du Quebec. L’Amerique du Nord a bien plus etudie ce sujet que nous. Je n’ai pas tout lu en details mais j’ai essaye de retrouver suffisament de references pour ceux qui souhaiteraient lire de plus.
– http://www.apgl.asso.fr/documents/doc11.htm
– http://www.touslesreves.com/articles/societe-homoparentalite.php
– www.apa.org/pi/parent.html (l’APA est l’American Psychological Association)
– http://www.apa.org/monitor/dec05/kids.html
et pour titiller M, une etude sur l’adoption par des parents homosexuels.
Enfin, pour elargir un peu le debat, je vous rappelle tout de meme ce qu’il se disait il y a 50 ans sur le devenir des enfants de divorces… A chaque epoque ses peurs et ses avancees reflechies. Je vous signale qu’Elisabeth Roudinesco considere d’ailleurs que les enfants de parents homosexuels sont dans une situation comparable à celles des enfants de parents divorcés il y a plusieurs décennies.
Amities Socialistes Christophe Monier, Section de New York