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Peine de mort : intervention de Richard Yung au Sénat, le 7 février 2007

ryJe souhaite réaffirmer les raisons pour lesquelles le groupe socialiste suivra l’avis du rapporteur et votera unanimement en faveur de ce projet de loi constitutionnelle.

Ce débat symbolique et historique honore notre République et la mémoire de ses pères fondateurs. En gravant dans la Constitution le principe selon lequel « nul ne peut être condamné à la peine de mort », nous allons lancer un message particulièrement fort à l’endroit de celles et de ceux qui, dans notre pays – il y en a encore ! -, continuent de prétendre que le rétablissement de la peine capitale pourrait constituer – je cite Jean-Marie Le Pen – « une garantie de limitation de l’ensemble de la criminalité et une prérogative indispensable à l’exercice de la souveraineté de l’État ».

Les derniers avocats de ce châtiment cruel sont décidément bien aveugles et sourds ! Pour tenter de les convaincre de reconsidérer leur point de vue, je reprendrai ces propos, extraits de la correspondance de Julien Green avec Jean Paulhan, le « pape » de la NRF, qui méritent réflexion : « on ne devrait jamais condamner un homme à mort parce que nous ne savons pas ce que c’est que la mort ».

Je voudrais ici rendre hommage à François Mitterrand et à notre collègue Robert Badinter, qui s’est tant battu pour bannir de notre droit la peine capitale, cette « expression légalisée de l’instinct de mort », selon sa formule.

Grâce à Robert Badinter, le 30 septembre 1981, le Sénat votait l’abolition de la peine de mort par 161 voix contre 126. L’écart n’était pas si grand. Nous espérons tous aujourd’hui que le vote qui sera exprimé par la Haute Assemblée sera unanime.

La révision constitutionnelle qui nous est présentée aujourd’hui est le prolongement de ce combat humaniste. Elle est d’abord un préalable à la ratification du deuxième protocole facultatif se rapportant au pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort. Elle permettra aussi la ratification du protocole n° 13 à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui consacre « l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances » et dont les dispositions ne peuvent faire l’objet d’aucune dérogation. Ce sont des points importants qu’il faut garder en mémoire dans notre débat.

Nous devons aussi rester modestes car, comme cela a été dit, la France n’a pas montré la voie dans l’abolition de la peine de mort. Je rappelle en effet, après d’autres orateurs, que la dernière exécution capitale remonte à trente ans : le 10 septembre 1977, Hamida Djandoubi était guillotiné.

Je souhaite enfin souligner la valeur d’exemple de cette réforme qui nous conduira prochainement au Congrès. Cette dernière marquera en effet une étape supplémentaire sur le chemin de l’abolition universelle de la peine capitale, à la fois dans les textes mais aussi dans la pratique. Aujourd’hui, cent vingt-huit pays sont abolitionnistes ; il en reste donc quatre-vingts à convaincre !

L’exécution récente de Saddam Hussein et la reprise, dans des conditions que l’on peut qualifier de « pénibles », des pendaisons au Japon, où quatre condamnés à mort ont été pendus le 25 décembre dernier, nous rappellent l’urgence de soutenir davantage les abolitionnistes partout dans le monde, dans les pays qui maintiennent cette « forme légale de barbarie ».

Voilà donc les raisons essentielles pour lesquelles le groupe socialiste votera unanimement la réforme proposée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC.)

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