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Pourquoi les nonistes du PS votent oui au nouveau traité.

Plutôt que les nonistes d’ailleurs il serait sans doute plus exact de dire des nonistes. Les signataires de la déclaration ci-dessous parue dans Libération aujourd’hui, expliquent leur démarche. Je ne sais s’ils parviendront à convaincre tous les nonistes mais l’analyse est intéressante et laisse entrevoir la possibilité de sortir de l’une des ornières dans lesquelles le PS se trouve actuellement. Je voulais vous soumettre ce texte sans autre commentaire.

Pourquoi les nonistes du PS votent oui au nouveau traité ?

Par Vincent Peillon, député européen, membre du bureau national, David Assouline, sénateur de Paris, secrétaire national du PS, Jacques Bascou, député de l’Aude, membre du bureau national, Geneviève Gaillard, députée des Deux-Sèvres, Jean Gaubert, député des Côtes-d’Armor,Jean Guérard, vice-président de la région Aquitaine, membre du bureau national, Christian Martin, conseiller régional de Paca, secrétaire national du PS, Béatrice Patrie, députée européenne, Gilbert Roger, maire de Bondy, membre du bureau national, Claude Saulnier, sénateur des Côtes-d’Armor,Pascal Terrasse, député de l’Ardèche, président du conseil général, secrétaire national du PS, Jean-Jacques Thomas, maire d’Hirson, membre du bureau national.

Le Parti socialiste va devoir maintenant délibérer et adopter sa position face au traité de Lisbonne. Disons le clairement : s’abstenir ou refuser de participer au vote sur la ratification du traité de Lisbonne, ce serait faire le choix de pérenniser en notre sein la pratique des compromis inaudibles dans le débat public et inefficaces à éviter les divisions. C’est pourquoi nous devons être capables de définir une ligne majoritaire qui soit à la fois lucide sur la portée limitée du traité, consciente des nécessités immédiates de la relance de l’Europe et avant tout soucieuse d’y impliquer les citoyens. Rien ne lui interdit non plus d’être respectueuse de la minorité ! A juste raison, le Parti socialiste défend aujourd’hui l’organisation d’un nouveau référendum. Il le fait au nom d’une certaine conception de la relation entre la souveraineté nationale et la citoyenneté européenne. Opter pour la procédure parlementaire de ratification plutôt que pour la voie du référendum, c’est, de la part du pouvoir en place, marquer sa profonde défiance à l’égard de la souveraineté populaire au motif qu’elle ne s’est pas exprimée en 2005 dans le sens attendu. C’est la dessaisir de l’enjeu européen. C’est plonger à nouveau l’Europe dans un sommeil démocratique dont il n’y a jamais rien de bon à attendre.

Mais si l’on demande un référendum, alors il faut convenir qu’il y a quelque inconséquence à dire que, si on l’obtenait, ce serait pour s’abstenir. Car au cadeau de la division, que l’on n’empêchera pas, on en ajoutera un second : celui de la dérobade du Parti socialiste à une question qui ne porte ni sur la vie interne du Parti socialiste ni même sur la vie nationale, mais sur l’Europe, et qui sera posée en même temps dans vingt-six autres pays. Quelle conception peu responsable de notre rôle si nous demandions à l’ensemble des Français de trancher en nous refusant nous-mêmes à le faire ! A l’évidence, si la gauche avait gagné la présidentielle, nous n’aurions pas négocié ce texte de la sorte. Prenant appui sur le non français qui ouvrait l’espace d’une renégociation, c’était d’ailleurs tout son intérêt, nous aurions posé d’autres exigences : celle d’une Europe sociale, dotée de nouveaux outils d’harmonisation des systèmes nationaux de droit du travail, de protection sociale et de fiscalité, d’une Europe réorientée vers la croissance et l’emploi, par la modification des objectifs de la Banque centrale et le vote d’un budget digne de nos ambitions en matière d’industrie et de recherche, et enfin d’une Europe capable de mieux protéger ses salariés contre une concurrence mondiale asymétrique. Pour nous qui, au sein du PS, avons milité en 2005 pour le non au traité constitutionnel, il est bien évident que ce texte ne répond pas à notre vision de l’Union. Le traité de Lisbonne doit être jugé pour ce qu’il est : un texte dont l’unique objet est de tenter d’améliorer le fonctionnement des institutions de l’Union. Ainsi a été supprimée la troisième partie du traité constitutionnel qui avait pour effet de «graver dans le marbre» l’ensemble des politiques européennes les plus libérales. En outre, le texte désormais proposé n’a plus valeur de constitution. Il n’est plus qu’un classique traité «modificatif» qui amende les traités existants sans s’y substituer. L’approuver ne signifie donc pas que l’on donne quitus à l’ensemble de la construction européenne, comme y conduisait implicitement l’adoption du traité constitutionnel.

Le traité de Lisbonne peut-il permettre de fluidifier le fonctionnement des rouages de l’Union, grippés par un élargissement à vingt-sept Etats membres si mal préparé et un traité de Nice si mal négocié ? Force est de constater que, même si les blocages institutionnels n’expliquent pas à eux seuls l’impuissance de l’Union, les innovations du traité seront les bienvenues : un président du Conseil européen élu pour deux ans, un haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité aux pouvoirs renforcés et, au sein du Conseil des ministres, un nouveau mécanisme de vote à la majorité qualifiée. En outre, il faut se réjouir que, parmi les valeurs citées en préambule, soient ajoutées celles de non-discrimination, de justice, de solidarité et d’égalité entre hommes et femmes, et que, parmi les objectifs de l’Union, soient retirée la concurrence libre et non faussée. Enfin, un protocole sur les services publics permet de créer une base juridique en vue de l’adoption d’une directive-cadre sur les services publics, jusqu’alors refusée par la Commission.

Toutefois, le contexte est tout aussi déterminant. Ce qui a motivé, en 2005, notre opposition au traité constitutionnel, c’est le défaut d’Europe. Ce qui justifiait notre stratégie, c’est que l’on puisse prendre appui sur le non pour exiger plus d’Europe, là où nous en avons besoin. En 2005, la gauche française avait la perspective d’une victoire à la présidentielle. Elle aurait eu à conduire elle-même la renégociation, puis à assumer la présidence française de l’Union qui s’ouvrira en juin. Ce n’est plus le cas. Dès lors, la stratégie développée à l’époque est caduque. Il y a bien eu renégociation, comme nous le disions, mais c’est Nicolas Sarkozy qui l’a menée et qui en a gâché la force. Aujourd’hui il faut voter sur le texte et non sur celui que nous imaginions. Si le traité de Lisbonne n’est pas adopté, nous en resterons à Nice, et pour longtemps.

Ce nouveau traité clôt donc un cycle. Une autre période s’engage, au cours de laquelle les socialistes français devront se battre plus que jamais pour donner un nouveau cap à l’Europe. Ils n’y réussiront pas seuls, mais en lien avec la social-démocratie européenne. C’est ce à quoi nous voulons inviter nos camarades socialistes.

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