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BIP N° 105 - Les Français veulent une vraie réforme

Les Français hostiles par principe à toute réforme ?
C’est ainsi que la presse étrangère présente la mobilisation actuelle contre la réforme des retraites. Elle n’y voit pas l’expression de la démocratie française, telle qu’elle s’est constituée à partir de 1789 : égalitaire et hostile à l’autoritarisme. Un président élu en France pour cinq ans ne revêt pas l’habit du monarque incontestable et ses électeurs ne se transforment pas en autant de sujets.
La réforme des retraites fonctionne aujourd’hui comme une cristallisation. 3 ans après l’élection de N. Sarkozy, la nuit du Fouquet’s et l’institution du bouclier fiscal, les Français rejettent l’injustice cyniquement proclamée comme mode de gestion économique, sociale et politique par le Président de la République. Les Français rejettent cette réforme des retraites parce qu’elle est génératrice d’appauvrissement pour l’immense majorité d’entre eux. Ils ne sont pas dupes : la richesse produite en France augmente grâce à la productivité des actifs, supérieure à celle des Américains et de tous les autres Européens. Or, les salaires stagnent ou baissent, le nombre de chômeurs explose et la rémunération du capital est plus élevée que jamais. Les banques en particulier sont récompensées d’avoir provoqué la crise et sont encouragées à persister dans des pratiques qui généreront la suivante.

Les Français rejettent cette réforme des retraites parce que ce que la droite leur présente comme « réformes » depuis huit ans conduit à une régression générale des conditions de vie : logement inaccessible, durée de transport allongée, travail sous pression, emploi précaire, accès aux soins de plus en plus coûteux, services publics menacés, supprimés ou privatisés pour le plus grand profit de Veolia, Vinci, etc.
Au-delà du texte que la majorité sénatoriale finira par voter – après le coup de force d’hier – c’est donc un malaise plus général que l’opinion exprime dans la rue et les sondages.
La réforme imposée par le gouvernement a pour objectif de mettre en place un système où plus personne n’aura accès à une retraite complète. Entre le chômage des jeunes, les contrats précaires, les carrières hachées et le chômage des plus de 55 ans, on sait que les adultes d’aujourd’hui atteindront difficilement 30 annuités, quel que soit l’âge légal de départ en retraite, d’où une perte de revenus importante pendant la vieillesse. Voilà qui incitera à l’épargne individuelle dans les fonds de pensions Mederic sur lesquels Guillaume Sarkozy, frère de Nicolas, a pu mettre la main.

Depuis 2007, tout a été fait pour que 4,6 millions de Français soient au chômage et que 8 millions d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. Les cotisations des actifs manquent donc à l’équilibre des comptes de l’assurance maladie comme de l’assurance vieillesse. La mesure du report de l’âge légal de la retraite à 67 ans pour une retraite complète ne peut pas être acceptée par les Français dans un tel contexte. Elles sont injustes et financièrement sans impact durable.

Alors, les Français hostiles à toute réforme ?
Non. Ils ont soutenu des réforme audacieuses proposées par la gauche : l’abolition de la peine de mort, la décentralisation, la réduction du temps de travail légal à 35h moyennant une modération salariale de plusieurs années, la couverture maladie universelle, le PACS, etc. La mobilisation actuelle des Français incarne en réalité le désir de réformes génératrices de progrès social :

  • Oui à une réforme qui rende aux jeunes et aux seniors la possibilité de travailler et de cotiser. C’est par là qu’il faut commencer.
  • Oui à une réforme juste qui mettra à contribution les revenus du capital et garantira un revenu de remplacement suffisant aux retraités.
  • Oui à une réforme négociée dans laquelle l’âge du départ sera modulé en fonction du parcours professionnel de chacun et de la pénibilité de son travail.
  • Oui à une réforme des retraites efficace et juste !

Monique Cerisier ben Guiga

 


Publié le 22 octobre 2010