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BIP n°71 – T'as pas cent balles ?

Après les 5 milliards de la Société générale, les 6 milliards de Dexia et les (petits) 600 millions de la Caisse d’Épargne, 360 milliards d’euros pour aider les banques…
On a la raison qui flanche devant de telles sommes d’autant qu’en même temps le Quai d’Orsay n’a plus cent sous pour offrir, le 14 juillet, un verre de muscadet ou, mieux, de vouvray, dans ses ambassades. Mais le plus étonnant c’est que toutes ces pertes n’ont pas d’effets, nous assure-t-on, sur les comptes des entreprises ni de l’État ! Cela rappelle « tout va très bien, Madame la Marquise » et laisse la plupart d’entre nous sceptiques.

Les mesures d’urgence prises par les gouvernements européens (accroître les liquidités du marché interbancaire, recapitaliser les banques, et sans doute bientôt baisser les taux d’intérêt)  sont nécessaires pour éteindre l’incendie : espérons qu’elles seront efficaces.
Les gouvernements européens, après l’échec du « G4 » du 4 octobre, ont réussi à coordonner leur action d’abord au sein de l’Eurogroupe puis lors du Conseil européen. Un début de gouvernance européenne en matière financière : réjouissons-nous de cette petite avancée.

Mais il faut aussi agir à moyen terme et traiter la crise de l’économie réelle : récession économique, chômage en hausse forte, déficits croissants de la balance commerciale et de tous les comptes publics. Certes la crise de l’économie américaine en est le déclencheur mais il faut aussi souligner combien la politique fiscale à contretemps de MM. Sarkozy et Fillon a aggravé la situation française : gaspillage de 15 milliards d’euros dans le bouclier fiscal inutile et injuste, création de 12 impôts nouveaux en un an (un record), augmentation des prélèvements obligatoires, refus d’augmenter les salaires et donc la consommation, sans parler de la paupérisation de presque la moitié des Français. Décidément, la Droite française gaspille tous les bénéfices acquis sous le gouvernement Jospin.
Il serait cruel de rappeler les slogans « travailler plus pour gagner plus », « j’irai chercher la croissance avec les dents », « je serai le Président du pouvoir d’achat » qui sont maintenant vécus comme autant de gifles par les Français.
Il est temps de tourner le dos à cette politique dramatique :  augmenter les salaires et les prestations sociales, revenir sur tous les cadeaux fiscaux et les franchises médicales, investir dans la recherche, l’éducation, la santé... Ce n’est pas moins d’État que veulent les Français, c’est mieux d’État et puisque l’État va entrer massivement au capital des banques, profitons-en pour définir une politique industrielle offensive comme nous l’avons fait avec les TGV, les Airbus, Ariane, et pour demander des dividendes qui serviront à rembourser cette dette publique inouïe accumulée sur la tête de nos petits-enfants.
Améliorons notre système de retraite par répartition et réjouissons-nous de ne pas dépendre des marchés pour nos vieux jours !
Proposons à l’Europe et au FMI une action de contrôle, d’alerte et de régulation des marchés bancaires et financiers, créons des agences publiques et européennes de notation, demandons à la BCE de jouer un rôle actif également pour la croissance et l’emploi.
Et un peu d’éthique ne ferait pas de mal : plus de primes, stock options et parachutes pour tous ces dirigeants qui ruinent leurs entreprises et licencient des milliers de salariés. Qu’allaient faire la Caisse d’Épargne et Dexia (ancien Crédit communal de France), toutes deux institutions de pères de famille, sur les marchés spéculatifs les plus volatils ?
Revenons vers le réel et retrouvons la raison : que les banques financent les entreprises et ne spéculent pas avec l’argent des déposants ; que les entreprises investissent dans les produits innovants et créent des emplois. Retrouvons la croissance saine et des salaires décents.
La vérité est dans ces choses simples mais perdues de vue, voire oubliées dans le délire de l’argent facile.

Richard YUNG


Publié le 20 octobre 2008