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SOCIAL - Urgence sociale

Rien n’arrête Nicolas Sarkozy. De la politique compassionnelle du début de son mandat, qui voyait chaque fait-divers tragique provoquer une nouvelle loi, à la remise en question aujourd’hui du système économique mondial, il prétend tout embrasser, tout résoudre, tout réguler. Sa politique - plus faite d’incantation que de conviction - est censée rassurer tout à la fois les banques, les épargnants, les entreprises, les salariés et, finalement, le monde entier puisqu’il a convaincu ses pairs de se pencher au chevet d’un libéralisme exsangue.

Seulement voilà … A force d’avoir tout dit et son contraire en quelques mois (Hier : il nous faut moins d’Etat, plus de marché libre, dégraissons, dérégulons ! Aujourd’hui : à moi l’Etat-Providence ! sauvons les banques, les entreprises et les emplois !), les psalmodies ne suffisent plus au moment où les conséquences de la crise financière commencent à toucher le quotidien des vrais gens. Les vrais gens, vous vous rappelez ? Dignes successeurs des habitants de la « France d’en bas », ils ont été très sollicités lors de la dernière campagne présidentielle, propulsés sur le devant de la scène par les grandes chaînes de télévision pour être les principaux interlocuteurs des candidats lors des émissions politiques.

Que deviennent-ils aujourd’hui dans la tourmente, ces vrais gens ?

Certains, surendettés à la suite de surconsommation à laquelle les crédits (à la consommation …) des banques les ont incités, vont se trouver encore plus pauvres qu’auparavant et frôler l’exclusion.

Les autres vont devoir refinancer par l’impôt le système bancaire afin d’éviter la faillite totale de notre économie, système qui a vu, écrit Jacques Attali dans son blog, « les revenus financiers augmenter de 20 % par an quand ceux du travail n’augmentaient que de moins de 2 % ».

Et pendant ce temps de récession beaucoup vont se rapprocher de la précarité : Renault, Peugeot, La Caisse d'Épargne, La Redoute, La Camif, Kronenbourg, Altadis, Sanofi Aventis, Arcelor Mittal entre autres, recourent déjà soit au chômage technique soit au licenciement pour des raisons liées à la crise financière. L’économie « réelle » est touchée dit la presse, c’est à dire l’économie des vrais gens, celle de notre quotidien.

Alors ? Un plan pour les banques, un pour les entreprises et voici maintenant un « discours de mobilisation pour l’emploi », notre président a réponse à tout et peu importe si c’est au détriment de la cohérence. La rhétorique, elle, est bien rôdée : « L'argent des banques est le nôtre » (sic) et le soutien aux PME « est fait pour les salariés, pour la croissance et l'emploi, pas pour les banques ». Comprenez : oui les caisses sont vides c’est pourquoi il faut mettre « notre » argent en commun pour refinancer les banques et pour soutenir les entreprises, ainsi vos emplois seront protégés. Aide-toi et l’Etat t’aidera… Ficelez le tout avec l’annonce de 100 000 contrats aidés supplémentaires et le tour est joué. Ce n’est pas aussi simple. Cette fois-ci le président ne pourra pas faire l’économie d’un véritable débat social.

Par-delà l’ironie de voir le candidat libéral de 2007 annoncer le « grand retour du traitement social du chômage » en 2008, comme l’écrit Jacques Freyssinet dans Le Monde, il ne faut pas se réjouir. Le chômage a rebondi spectaculairement en France cette année ; avec ces mesurettes le pouvoir pense contenir la colère sociale, comme il peut, avec des mots.

Mais pourra-t-il longtemps payer ainsi les vrais gens ?

Claudine Lepage



Publié le 30 octobre 2008