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Audition de Bernard Kouchner

La commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées a procédé, le jeudi 25 octobre à l'auditionde M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes, sur le projet de loi de finances pour 2008 (mission « Action extérieure de l'Etat »).

A cette occasion,Mme Monique Cerisier-ben Guiga, rapporteur pour avis des crédits du programme « Rayonnement culturel et scientifique », s'est élevée contre les conditions d'examen du projet de loi de finances par la commission, considérant que les conditions de contrôle par le Parlement n'étaient pas remplies, en raison notamment de la mise à disposition tardive des documents budgétaires et de la tenue d'une réunion un jeudi en fin de journée. Elle s'est interrogée sur la capacité du ministère à atteindre ses objectifs, en l'absence de moyens suffisants. Elle a évoqué les difficultés du consulat de Riyad à délivrer en temps utile les visas à des étudiants en médecine dont les études sont pourtant totalement prises en charge par le gouvernement saoudien, et ce faute d'agents. Elle a considéré que l'idée de réduire le réseau consulaire en Europe était erronée, en raison de la mission qui lui est confiée à l'égard des ressortissants français à l'étranger, qui sont, pour la moitié d'entre eux, soit 700.000, installés en Europe. Elle a comparé leur rôle à celui des sous-préfectures. Elle a souhaité des précisions sur les modalités de prise en charge des frais de scolarité des élèves de terminale, à partir de la rentrée 2007, tout en s'interrogeant sur l'origine des 5 millions d'euros nécessaires.

Evoquant les crédits destinés aux bâtiments scolaires, elle a rappelé que l'audit réalisé sur les 73 établissements en gestion directe avait évalué l'effort nécessaire à une remise en état à 240 millions d'euros sur cinq ans. Elle a craint, qu'au vu des crédits alloués en 2008, 8 millions d'euros, les investissements ne soient financés par une augmentation des droits de scolarité, alors que les crédits consacrés aux bourses sur critères sociaux ne progressent pas.

Evoquant le bilan du contrat de modernisation du ministère des affaires étrangères, elle a considéré que le ministère avait consenti à des pertes d'effectifs dont il n'avait pas reçu l'intégralité de la contrepartie, le retour sur les recettes de visas étant limité à 18 millions d'euros.

A propos de la réforme de l'audiovisuel extérieur, elle a souligné que TV5 Monde était une chaîne généraliste dont les programmes ne correspondaient pas aux besoins du voyageur pressé, mais répondait aux attentes d'un public souvent partiellement francophone, en raison du sous-titrage et de la grande diversité des programmes. Elle a souligné la qualité de l'outil pédagogique « Apprendre le français » proposé par la chaîne.

Elle s'est enfin interrogée sur le choix de deux cabinets anglo-saxons pour dispenser une expertise sur le domaine immobilier de la France à l'étranger.

En réponse, le ministre a notamment apporté les éléments suivants : 

Le ministre a relevé que l'adaptation du réseau consulaire devait s'accompagner d'une modernisation des comportements, avec notamment un recours accru à l'internet ;

  • l'impulsion que la France souhaite donner la création de consulats communs à l'ensemble des pays de la zone Schengen sera stimulée à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne, au deuxième semestre 2008 ;
  • la réorganisation du réseau diplomatique a pour objectif d'aboutir à un système plus souple et plus flexible ; en particulier, la notion d'ambassade régionale, chargée plus spécifiquement d'actions culturelles ou d'une veille économique, est prometteuse ; de telles actions pourraient, par exemple, être menées en Asie centrale, en Afrique australe, ou en Amérique latine ; de même la création de plateformes régionales de service doit être envisagée ;
  • le personnel des réseaux diplomatique comme consulaires doit pouvoir être utilisé avec plus de souplesse, à l'exemple des experts britanniques qui acceptent facilement d'accomplir des missions ponctuelles de quelques semaines ou quelques mois au bénéfice du Foreign Office. Il est regrettable qu'il ait été si difficile de pourvoir le poste créé par notre ambassade de Khartoum à Al Fascher, au Darfour ;
  • la difficulté des conditions de vie dans la capitale est ressentie par tous les agents de la fonction publique. Il ne convient pas pour autant de réduire les primes des agents en poste à l'étranger, destinées à compenser des contraintes spécifiques, comme l'impossibilité de travailler pour le conjoint ; certains de ces postes peinent, d'ailleurs, à être pourvus. La situation des agents de l'administration centrale a pu s'améliorer ces dernières années grâce au retour d'une partie des économies dégagées par les réductions d'effectifs, à hauteur de 10 millions d'euros durant le contrat de modernisation 2006-2008.

M. Bernard Kouchner a également souligné la grande diversité des statuts des personnels et les problèmes de gestion des contractuels. Une réflexion sur le profil du personnel du réseau diplomatique français à l'étranger devait être faite.

Concernant la réforme de l'audiovisuel extérieur,actuellement en cours de discussion, M. Bernard Kouchner a indiqué qu'à ce stade, l'idée serait de disposer d'une chaîne généraliste, TV 5, et d'une chaîne diffusant de l'information brute et objective, à un rythme régulier. Actuellement, France 24, chaîne d'information dynamique, est peu diffusée, alors que TV5 Monde, qui est davantage une chaîne culturelle, bénéficie, grâce aux efforts de l'ancien président Serge Adda, et de ses successeurs, d'une très bonne diffusion mais la qualité de ces programmes est diversement appréciée. Il faudrait donc pouvoir allier ces deux entités dans un paysage audiovisuel qui comprend également Radio France International (RFI). En outre, il est nécessaire de disposer d'un site internet commun à l'ensemble des opérateurs audiovisuels extérieurs. Les difficultés sont liées au caractère multinational de TV5, dont les évolutions doivent être négociées avec nos partenaires francophones. Alors que TV5 est financée pour l'essentiel sur le budget du ministère des affaires étrangères, France 24 relève des services du Premier ministre, et est le produit d'un partenariat paritaire entre TF1 et France Télévisions. Le gouvernement pourrait rechercher une complémentarité entre France 24 et RFI, mais aucune décision n'est prise. Cela supposerait de proposer aux journalistes de RFI une formation aux métiers de la télévision, ce qui soulève des questions de statut et des questions financières.

Le ministre a indiqué qu'au terme de sa lettre de mission, il partageait la responsabilité de ce dossier avec Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication. Le schéma pourrait consister dans la cohabitation de TV5, chaîne généraliste, et de France 24, chaîne d'information continue, ce qui suppose naturellement d'en discuter avec les partenaires de la France. Le modèle n'est pas la BBC, excellente chaîne, mais qui rencontre des difficultés, mais bien plutôt un modèle d'organisation originale.

Concernant les modalités de financement de la prise en charge des frais de scolarité des élèves français des établissements scolaires à l'étranger, le ministre a indiqué que 5 millions d'euros seront consacrés au financement de cette mesure dès la rentrée de 2007 et que 20 millions d'euros seraient prévus dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008. En ce qui concerne l'année 2007, les fonds proviennent de la levée de la mise en réserve de crédits du budget de l'année 2007. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008, il s'agit de mesures nouvelles, a précisé le ministre.

Le ministre a souligné que les 8,5 millions d'euros supplémentaires consacrés à l'immobilier à l'étranger seraient également financés par des mesures nouvelles et qu'il se mobiliserait pour poursuivre cet effort sur les budgets suivants.

Il s'est également félicité de l'augmentation des crédits du programme des Français à l'étranger qui passent de 283 à 310 millions d'euros de 2007 à 2008. Sur le plan de la modernisation des effectifs, le ministre a rappelé que le ministère des affaires étrangères avait été exemplaire en matière de réduction des effectifs, avec une baisse de 12 % ces dernières années et 234 suppressions de postes en 2008. S'agissant des contractuels, il a considéré qu'il était important de garder des personnels qualifiés expérimentés, et qu'il fallait favoriser les parcours professionnels entre le ministère et ses grands partenaires culturels ou autres.

Enfin, le ministre a rappelé que l'expertise de l'immobilier de la France à l'étranger avait été confiée à deux cabinets anglo-saxons au terme d'un appel d'offres.


Publié le 05 novembre 2007