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Audiovisuel international / France Monde, ORTF de l'extérieur

Monique Cerisier ben Guiga sénatrice des Français établis hors de France, rapporteuse du budget médias.
Libération, Rebonds : jeudi 28 février 2008

Le Président de la République voudrait détruire l’ensemble de l’audiovisuel extérieur construit par la France depuis la création de RFI et TV5 qu’il ne s’y prendrait pas autrement. Nommer le président et le directeur de la holding France Monde sans l’accord des partenaires francophones de TV5 Monde sur le principe même de l’intégration de la chaîne dans la holding et encore moins sur les personnalités désignées, c’est faire preuve d’un mépris inconcevable par nos partenaires.

Sous de tels auspices, comment la réunion de TV5 Monde à Ottawa pourrait-elle déboucher sur un bon accord ? Nommer Alain de Pouzilhac, le président de France 24, l’une des chaînes du groupe, à la tête de l’ensemble c’est, de toute évidence, s’apprêter à ajouter à son régime de faveur financier une prééminence politique sur les autres partenaires : RFI et TV5 Monde. Dans cette cohabitation forcée, on voit bien à qui est donné le pouvoir de prendre toute la place. Nommer Christine Ockrent à la direction de France Monde relève du népotisme et d’un mélange des genres inacceptable en démocratie entre le pouvoir médiatique et le pouvoir politique. Etre la compagne du ministre des Affaires étrangères ne disqualifiait cette journaliste de talent que pour un poste, celui-ci. Le président de la République joue notre audiovisuel extérieur comme au bowling. Mais là, les quilles cassent.

Sur le fond, notre président hexagonal n’a pas compris que, dans le monde d’aujourd’hui, le multilinguisme d’une part (celui de RFI et France 24), la diversité francophone de l’autre (assurée par TV5 Monde) étaient les meilleurs atouts de la France. Sur la forme, il obère l’avenir en dressant les uns contre les autres des partenaires destinés à coopérer.

Enfin, retirer toute tutelle sur l’audiovisuel extérieur au ministère des Affaires étrangères pour transférer l’ensemble au Premier ministre c’est affirmer clairement que l’audiovisuel extérieur de la France apprécié dans le monde pour sa diversité de ton et son indépendance se réduit à la fonction de porte-voix du pouvoir français. Le temps de la Françafrique est revenu, comme on vient de le voir au Tchad, supplantant celui de la francophonie. Ne voyons-nous pas revoir aussi le temps de l’ORTF ?

 


Publié le 29 février 2008