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Le gouvernement sommé de plafonner le remboursement des frais de scolarité à l'étranger

Après les députés, les sénateurs ont voté un amendement imposant au gouvernement de plafonner par décret, avant le 31 juillet, la prise en charge par l'Etat des frais de scolarité des enfants français scolarisés à l'étranger.

La promesse de Nicolas Sarkozy de rembourser intégralement les frais de scolarité dans les lycées français de l'étranger continue de susciter d'âpres débats. Aujourd'hui, les frais sont remboursés sans restriction à partir de la classe de seconde pour les enfants français scolarisés dans un établissement d'enseignement français à l'étranger. L'extension au-delà a été gelée, en raison de son coût qui serait de 750 millions d'euros, selon Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères. Un peu plus de 5.000 familles en ont profité cette année, dont 300 disposent d'un revenu annuel supérieur à 150.000 euros, le coût du dispositif atteignant près de 100 millions.

 

Le mois dernier, l'Assemblée avait voté le plafonnement du remboursement, à fixer par arrêté en fonction du revenu des familles et du pays de résidence (comme pour les bourses), en espérant réaliser 10 millions d'économies. Toujours dans le cadre du débat sur le projet de loi de Finances 2010, le Sénat a annulé en début de semaine la réaffectation de ces 10 millions, jugeant le dispositif trop fragile. Mais il a lui aussi voté un amendement imposant au gouvernement de plafonner le remboursement des frais de scolarité. L'amendement issu de la commission des Finances a été approuvé par la commission des Affaires étrangères, la gauche et de nombreux sénateurs UMP, contre l'avis du gouvernement et du président du groupe UMP, Gérard Longuet.

 

Effets pervers

Il prévoit qu'un décret fixant les modalités du plafonnement devra être publié avant le 31 juillet, afin que la réforme entre en vigueur dès la rentrée prochaine. Le Sénat s'impatiente car il réclamait déjà une telle évolution l'an dernier. « Il suffit de se déplacer à l'étranger pour constater des prises en charge qui ne correspondent ni à l'équité ni à la bonne gestion des deniers publics », a avancé l'auteur, Adrien Gouteyron (UMP), avec l'appui de Jean Arthuis, président de la commission des Finances, qui a mis en avant les effets pervers du dispositif : « Les entreprises qui finançaient en partie la scolarité des enfants de leurs expatriés ne le font plus, au lycée de New York par exemple. » Bernard Kouchner a défendu en vain un retrait en demandant à ce que soit « d'abord fait le bilan de la gratuité des études » et en proposant une mission parlementaire. Mais le ministre a admis en cours de débat que « les frais de scolarité explosent » et que « certaines entreprises profitent de cette prise en charge ».

 

« Revenons à la réalité », a asséné Robert Badinter (PS) en rappelant les frais de scolarité actuels (entre 15.000 et 23.000 euros par an à New York et San Francisco) : « Au nom de quoi, dans une période budgétaire si difficile, la collectivité nationale prendrait-elle en charge de tels montants pour le fils d'un trader français de Wall Street ? Cela n'a aucun sens, le plafonnement s'impose. » Il reste à en fixer les modalités. Bernard Kouchner estime qu'un « plafonnement indexé sur le coût de la vie » serait « intelligent », alors qu'un « plafonnement sur les revenus parentaux » serait « socialement juste mais lourd à gérer et imposerait un contrôle inenvisageable ».

 

ÉTIENNE LEFEBVRE, Les Echo, 02/12/2009


Publié le 03 décembre 2009