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BIP n° 6 - Situation au Togo

Depuis le coup d’état de 1963 et l’assassinat de Sylvanus Olympio par lequel Eyadema a conquis le pouvoir au Togo, la France, quel qu’en soit le gouvernement, a toujours préféré composer avec le dictateur plutôt que de défendre les droits du peuple togolais. C’est un scénario connu dont la France et les Français d’Afrique n’ont pas fini de payer les conséquences. Il est difficile à la France d’être crédible aux yeux des peuples d’Afrique aujourd’hui.

Au Togo, plus de quarante ans de dictature militaire et de pillage des ressources par le clan Eyadema ont ruiné un petit pays qui avait pourtant de solides atouts : une population industrieuse, des richesses naturelles, dont les phosphates, le port de Lomé par lequel transitent les marchandises vers l’arrière-pays sahélien.

Le progrès par la démocratie avait déjà été volé aux Togolais en 1990, sans que la France ne change réellement sa relation avec Eyadema. Après la mort de celui-ci, les Togolais ont réussi à obtenir, par leur détermination, qu’une élection présidentielle ait lieu. Elle ne s’est pas déroulée dans des conditions démocratiques. Les témoignages de fraudes sont nombreux. Et voilà qu’une fois de plus, le gouvernement français fait comme si tout était, dans l’ensemble, normal et satisfaisant. Le ressentiment des Togolais à l’égard de la France s’est exacerbé.

Depuis plusieurs mois, nos compatriotes de Lomé s’alarmaient de la montée de sentiments anti-français. Dimanche dernier, les émeutes, qui ont déjà fait 22 morts et provoqué l’exode de plus d’un millier de personnes qui fuient les exactions de l’armée, ont pris un tour anti-français. Des maisons ont été pillées, des pierres ont été lancées sur le lycée français. Le gouvernement français ne doit pas continuer à mener, au Togo, une politique de compromission avec les militaires et le clan Eyadema. Le peuple togolais est exaspéré. Nos compatriotes, souvent binationaux, partagent cette exaspération, mais savent qu’elle peut se retourner contre eux.

Monique Cerisier Ben Guiga
Sénatrice des Français à l’étranger


Publié le 28 avril 2005