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Le Sénat vote un texte éliminant le verrou de la nationalité pour les médecins

PARIS (AFP), 11/02/2009 — Le Sénat a adopté mercredi une proposition de loi socialiste supprimant les conditions de nationalité restreignant l'accès à certaines professions comme les médecins ou chirurgiens-dentistes.

Le texte ne modifie pas les conditions de diplôme pour l'accès à ces professions ni les conditions d'entrée et de séjour des étrangers.

La proposition de loi a été adoptée tous groupes politiques confondus par un vote à main levée à l'unanimité moins 5 abstentions. Elle devra maintenant être inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale pour poursuivre son parcours parlementaire en vue d'une adoption définitive.

Les professions concernées sont les médecins, les sages-femmes, les chirurgien-dentistes, les géomètres experts, les architectes, les vétérinaires et les pharmaciens.

Pour les architectes, vétérinaires et pharmaciens, des conditions de réciprocités des droits d'exercice ont toutefois été maintenues. Les professions d'avocats, d'expert-comptables et d'interprètes qui étaient initialement concernées par le texte ont finalement été retirées lors du passage de la proposition de loi en commission.

Actuellement des procédures dérogatoires existent pour les étrangers détenteurs d'un diplôme français mais elles sont soumises à une décision discrétionnaire du ministre concerné. Cette procédure "lourde et longue" a un caractère "humiliant", relève le groupe PS.

"Il est devenu plus aisé à un membre d'un Etat de l'UE titulaire d'un diplôme de son pays d'exercer qu'à un étranger, vivant sur notre territoire et titulaire d'un diplôme français, cela n'est pas acceptable" et "relève de la discrimination", a déploré l'auteure de la proposition de loi, Bariza Khiari (PS, Paris).

"Les fondements de ces restrictions sont historiquement datés et connotés, économiquement obsolètes et moralement condamnables" a-t-elle souligné.

Elle a précisé que ces limitations ont été adoptées "dans la période de l'entre-deux guerres lorsque montaient les tensions entre différents pays".

Le secrétaire d'Etat chargé du commerce, Hervé Novelli s'en est remis "à la sagesse" des sénateurs.

"Le gouvernement en retient et en approuve l'intention générale mais il estime que sa mise en oeuvre suppose à la fois des études d'impact qui nous manquent", et "devrait s'opérer dans un cadre plus large", a-t-il dit.

Le rapporteur du texte, Charles Gautier (PS, Loire-Atlantique) a évalué à près de 5,2 millions, le nombre d'emplois de titulaires dans la fonction publique "interdits aux étrangers non communautaires" et indiqué "qu'une cinquantaine de professions du secteur privé font l'objet de restrictions explicites liées à la nationalité".

Il a observé que "dans les faits, les règles sont souvent contournées" citant "par exemple des professeurs, des médecins dans les hôpitaux".

Huit professions pourraient s'ouvrir aux non-Européen

Les Echos, 12/02/0

Le Sénat a adopté hier une proposition de loi qui supprime les conditions de nationalité restreignant l'accès des travailleurs étrangers à huit professions libérales. Ces métiers étaient déjà ouverts aux ressortissants des pays de l'Union européenne. Ils le seront désormais aux étrangers de pays tiers, si le vote est confirmé à l'Assemblée nationale. Il s'agit des professions suivantes : médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, vétérinaires, architectes, experts-comptables. Les avocats, initialement concernés par la mesure, ont finalement obtenu que leur profession ne soit ouverte qu'aux ressortissants d'Etats liés à la France par des conventions de réciprocité. Une manière d'exclure les avocats « anglo-saxons », dont les membres du barreau français craignaient une arrivée en force sur le territoire national.

Condition du diplôme

Si la proposition de loi de la sénatrice Barisa Khiari lève la condition de nationalité, elle maintient, en revanche, la condition du diplôme. En clair, ne pourront se prévaloir de ce droit d'accès que les étrangers titulaires d'un diplôme français ou communautaire, ce qui limite de fait le nombre d'étrangers éligibles au dispositif. Le problème des nombreux médecins étrangers exerçant dans les hôpitaux français sans diplôme communautaire et sous des statuts précaires reste de ce fait entier.

« Belle preuve d'ouverture »

Ce vote n'en reste pas moins emblématique. Alors que les vagues de fermeture d'emplois aux étrangers se sont historiquement mises en place pendant les périodes de crise, notamment dans la première partie du XXe siècle, pour protéger certaines branches de l'économie, c'est en pleine tourmente économique que se fait aujourd'hui cette déréglementation. « Une belle preuve d'ouverture», se réjouit Barisa Khiari, dont la proposition a été adoptée à l'unanimité par les membres de la commission des Lois du Sénat et que le gouvernement semble envisager de manière positive.

L'initiative est également saluée par les associations de défense des étrangers, notamment France terre d'asile, qui y voit un progrès notable pour l'intégration des étrangers : « Les discriminations légales, qui visent à écarter les individus en raison de leur nationalité et non en raison de leurs compétences, constituent un obstacle supplémentaire dans le processus d'insertion, à l'heure où l'on exige de l'étranger qu'il s'intègre dans sa société d'accueil. » Six millions d'emplois, en grande majorité dans la fonction publique, demeurent néanmoins toujours interdits aux non-Européens.


Publié le 12 février 2009