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La folle promesse scolaire de Sarko

Le Canard Enchaîné, 24/12/2008

Malgré une levée de boucliers au Sénat, à Bercy comme au Quai d’Orsay, Sarkozy continue à soutenir mordicus une promesse de campagne, faite en mars 2007 : rembourser la totalité des frais de scolarité des quelque 100 000 enfants français inscrits dans les écoles et lycées français à l’étranger,
Indépendamment du revenu des familles. Or ces 450 établissements sont pour la plupart des écoles privées chics, simplement homologuées par l’Etat, où l’année coûte de l0 000 à l7 000 euros par an, par exemple, au Canada et aux Etats-Unis !
Cette promesse faite à la légère par le candidat Sarko pour draguer les électeurs français de l’étranger est entrée en vigueur, comme on sait, dès la rentrée 2007 pour les terminales (puis en 2008 pour les premières, et ainsi de suite) : elle coûte déjà, cette année, 40 millions à l’Etat, devrait grimper à 60 millions en 2010, à 94 en 2011... et exploser à 743 millions par an en 2018, lorsqu’elle sera étendue à toutes les classes, cours préparatoire inclus, d’après une simulation faite par le Quai d’Orsay et révélée par « Le Canard » cet été.
Déjà contrainte aujourd’hui de rogner sur ses autres dépenses, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger envisage de supprimer au moins la moitié de ses 1 300 profs, directeurs et comptables français en poste dans ces bahuts de l’étranger, mais aussi de fermer carrément des établissements en Europe, et de revoir à la baisse son programme d’investissement dans les bâtiments restants (176 millions d’euros prévus sur cinq ans)...

Kouchner de la guerre

Courageux, pour une fois, Kouchner s’oppose, depuis le départ, à cette mesure faussement sociale et égalitaire qui avantage les Français de l’étranger les plus riches (y compris des millionnaires !) et déséquilibre le système actuel de bourses. La Cour des comptes a souligné en décembre 2007 des « effets d’aubaine (...), notamment pour les familles qui n’acquittent aucun impôt en France ». Sans compter l’effet pervers qui pousse les grands groupes français (tels Auchan ou Darty) à ne plus prendre en charge les frais de scolarité pour les gosses de leurs expatriés... puisque l’Etat paie désormais à leur place !
Examinant le budget de l’Etat en première lecture, le Sénat a voté, le 5 décembre, un amendement plafonnant la gratuité, en vertu d’un montant maximum par pays de résidence et en tenant compte des ressources des familles. Mais, sur ordre de l’Elysée, le gouvernement a fait sauter l’amendement par la procédure du vote bloqué, dans la nuit du 9 décembre, à une heure du matin...
L’auteur de l’amendement, le sénateur UMP Adrien Gouteyron, qui est loin d’être un excité, continue de dénoncer une mesure ruineuse. A terme, celle-ci pourrait mobiliser 15 % du budget du Quai d’Orsay  ! En attendant une décision de la Cour de justice européenne, qui risque d’imposer la gratuité pour tous les petits camarades de l’Union européenne au nom du principe d’égalité entre élèves français et étrangers... Ce serait le bouquet


Publié le 05 janvier 2009