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Patrimoine immobilier des chefs d'état africains en France

La réponse du nouveau Secrétaire d'Etat à la Coopération à la question légitime de notre collègue Thierry Repentin, sénateur socialiste de Savoie, sur les patrimoines – en France – de certains chefs d'Etat africains est en dessous du service minimum. C'est se moquer de l'opinion et du Parlement ! Et dire que Jean Marie Bockel pensait pouvoir annoncer la fin de la Françafrique !

Question orale sans débat
Suites données à l’enquête concernant le patrimoine immobilier des chefs d’état africains en France

Monsieur le secrétaire d’Etat auprès du Ministre des affaires étrangères et européenne, chargé de la coopération et de la francophonie, je souhaite vous interroger au sujet de la récente enquête de l’Office Central pour la Répression de la Grande Délinquance Financière (OCRGDF) ouverte par le Parquet de Paris et faisant suite à une plainte pour « recel de détournement d’argent public » et dont la presse nationale a révélé l’existence fin janvier.

Cette enquête officielle met en évidence l’immense patrimoine immobilier en France de cinq chefs d’Etats africains congolais, guinéen, angolais, gabonais et burkinabé ou de leur famille, ainsi que les conditions d’acquisition « atypiques » de ce patrimoine dans notre pays.

Bien que la plainte ait été récemment classée, un reportage diffusé lundi 3 mars dernier sur une chaîne du service public a fait l’étalage de ces nombreuses et luxueuses acquisitions : plusieurs dizaines d’appartements, villas et hôtels particuliers dans les plus beaux quartiers de la capitale, à Neuilly-sur-Seine et à Nice, véhicules de grandes marques aux prix mirobolants… et ce, alors que la gestion financière des pays d’origine de certains de ces chefs d’Etat reste d’une grande opacité et que le luxe affiché contraste outrageusement avec les conditions moyennes de vie sur le continent africain, c’est le moins que l’on puisse dire.

A l’heure de la télévision par satellite, le monde entier a notamment pu voir dans ce récent reportage l’immense patrimoine immobilier des chefs d’Etat du Congo et du Gabon, deux petits pays africains producteurs de pétrole, comptant respectivement 4 millions et 1.2 million d’habitants, dont 70 % et 60 % de pauvres vivant avec moins d’un dollar par jour et où tout manque, routes, hôpitaux modernes, électricité et eau courante… Or, l’enquête de la police a démontré que beaucoup de leurs achats – dont l’unité de compte est le million d’euros – ont été réglés par des sociétés publiques. La même enquête aurait recensé, au-delà de ce patrimoine immobilier et du parc de véhicules de luxe, l’existence de plusieurs dizaines de comptes bancaires ouverts au profit de chefs d’Etat ou de leurs familles.

Monsieur le Secrétaire d’Etat, dans le contexte actuel de critique contre l’ancien système couramment appelé « Françafrique », et alors que l’exhibition de tant de richesses aux origines douteuses ne peut qu’indigner nos concitoyens et les habitants des pays concernés, je vous demande quelles suites le Gouvernement entend donner aux révélations choquantes de cette enquête policière, sachant que si le droit international protège – hélas – les chefs d’Etat en fonction, il n’en est pas de même pour leur famille.

Thierry REPENTIN
Sénateur de SAVOIE
25 mars 2008

Réponse de Monsieur Alain JOUYANDET, Secrétaire d’Etat à la Coopération et la Francophonie

Monsieur le Sénateur,

Les faits que vous évoquez ont fait l’objet d’une enquête préliminaire ordonnée par le parquet de Paris le 19 juin 2007.

L’enquête préliminaire a été menée en toute indépendance par l’autorité judiciaire et le dossier a été classé le 15 novembre de cette même année. Vous comprendrez qu’il n’appartient pas au gouvernement de s’immiscer dans le domaine judiciaire en commentant cette décision.

S’agissant plus généralement de la relation entre la France et l’Afrique, je vous invite à vous référer au discours prononcé par le Président de la République au Cap, qui fixe la ligne que suivra le gouvernement en matière de relations avec les pays africains.

Réponse de Thierry REPENTIN

Les conditions de la nomination du nouveau secrétaire d’Etat ne laissaient hélas pas attendre une réponse très ouverte sur les relations que la France entretient avec l’Afrique noire. Reste que je regrette la teneur administrative de votre réponse : que le parquet ait classé l’affaire n’interdit pas à un Etat qui prétend porter le message des droits de l’homme sur la scène internationale de se sentir concerné par un tel étalage de luxe de la part de ces chefs d’Etat. J’aurais aimé qu’une petite porte restât entrouverte…

 


Publié le 30 mars 2008