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BIP n° 41 - Ce dont le Darfour a besoin

La réunion le 20 mars à la Mutualité nous rappelle le drame, pour ne pas dire le génocide, qui depuis plusieurs années se perpétue sous nos yeux au Darfour. Un gouvernement intégriste, dictatorial et corrompu, y mène une guerre d’extermination contre d’autres musulmans - à la différence de la guerre civile qui oppose le même gouvernement soudanais aux chrétiens de la province du Juba. Tout cela pour contrôler le pétrole et surtout les pipelines de la région, et éviter la sécession de la province, ce qui entraînerait le jugement des responsables locaux par la Cour pénale internationale.
Le Darfour a par ailleurs souvent servi de base arrière à différentes forces oppositionnelles tchadiennes (Hissene Habré, Idriis Beby) luttant pour prendre le pouvoir à N’Djamena.
Le gouvernement soudanais s’appuie sur des milices locales, les Djandjawids, pour conduire une guerre utilisant méthodiquement viols, assassinats et destruction des récoltes. Nous ne pouvons pas dire que nous ne savons pas : plus de 200 000 morts, 400 000 réfugiés au Tchad, 2 millions de déplacés au Darfour même, vivant dans des conditions inhumaines, une attaque systématique des organisations humanitaires au point de les avoir chassées du terrain.

La communauté internationale montre un fois de plus son impuissance. L’accord d’Abuja du 5 mai 2006 n’est pas appliqué et consacre la division des rebelles. La résolution 1706 du Conseil de sécurité est rejetée par Khartoum. L’Union européenne vote des résolutions mais n’agit pas. Il en est de même de la France qui a pourtant 1700 hommes au Tchad pour protéger le régime d’Idriss Beby. Seuls les États-unis, il faut le dire, ont adopté des sanctions économiques et militaires. L’intervention de l’Union africaine sur mandat des Nations Unies est inefficace, le contingent de 7000 hommes se contentant d’observer sans intervenir.
Les Nations Unies sont paralysées puisque la Chine, membre permanent du Conseil de sécurité, s’oppose à toute proposition de sanctions. Il faut savoir que la Chine est devenue le premier investisseur au Soudan, avec 4 milliards de dollars, qu’elle possède 40% de la Greater Nile Petroleum Compagny, qu’elle achète au Soudan 50% de sa production de pétrole, que Hu Jin Tao y a récemment été reçu avec les honneurs.

Au moment où nous célébrons le cinquantième anniversaire du Traité de Rome, on se prend à rêver d’une Europe puissance qui ait la capacité de décider et d’appliquer des sanctions sévères contre des régimes comme celui de Khartoum, soit en faisant pression sur la Chine comme l’a justement réclamé Ségolène Royal, soit directement, en intervenant pour ramener la paix civile en aidant l’Union africaine. Voilà la vocation réelle de l’Europe !

Richard Yung
Sénateur des Français établis hors de France


Publié le 27 mars 2007